LES PROMESSES DE L'IMAGERIE SPECTRALE À COMPTAGE PHOTONIQUE
LUNDI 14 DéCEMBRE 2015
Le Pr Philippe Douek présentera, lors du prochain Symposium Scanner Volumique, la technologie de l’imagerie spectrale à comptage photonique. Cette innovation, au stade de la recherche pré-clinique aujourd’hui, permettra, à terme, d’obtenir des images de scanner sélectives suivant les matériaux que l’on voudra mettre en évidence, avec une résolution spatiale et une irradiation améliorées.

Le scanner nous surprend toujours un peu plus par les évolutions technologiques dont il fait régulièrement l'objet. Une innovation majeure dans ce domaine est en cours d'expérimentation au Cermep, le centre d'imagerie in vivo multimodale dédié à la recherche fondamentale et clinique, basé à Lyon Est, et sera présentée par le Pr Philippe Douek lors de son intervention au cours du 6ème Symposium Scanner Volumique qui se tiendra à Nancy les 25 et 26 janvier 2016.
Des photons classés par les détecteurs selon leur niveau d'énergie
Un scanner révolutionnaire y a été installé, afin de faire avancer les recherches sur l'imagerie spectrale à comptage photonique (ISCP). "Il s'agit d'un scanner, le seul de ce type en Europe, doté d'une technologie de détection très innovante, puisque les détecteurs sont capables de compter les photons X qui leur arrivent, tout en les classant selon leur niveau d'énergie, explique le Pr Philippe Douek, l'un des principaux initiateurs de ce projet. En pratique, ces détecteurs transforment les photons X directement en énergie électrique, elle-même proportionnelle à l'énergie des photons. C'est la différence majeure avec les scanners conventionnels."
Une résolution spatiale de 100 à 200µ
Depuis l'avènement des acquisitions en double énergie en effet, nous disposions de seulement deux spectres différents pour obtenir des images en coupe. Avec l'ISCP, il sera possible, à terme, d'obtenir des images dites "polychromatiques" distinctes, selon le niveau d'énergie des photons X utilisés. "Cette technologie permettra tout d'abord d'améliorer la résolution spaciale des images obtenues, avec une précision de l'ordre de 100 à 200 µ, poursuit le Pr Douek. Le bruit électronique sera également diminué, avec un gain de dose de radiation inférieur de 30% par rapport aux dernières technologies de tomodensitométrie. Enfin, on peut imaginer de créer une imagerie spécifique à des molécules que l'on voudra mettre en évidence."
Obtenir une imagerie spécifique pour différents matériaux
L'étét de l'art permet aujourd'hui de réaliser de l'imagerie de l'iode ou de l'eau pour mettre en évidence notamment des pathologies vasculaires au scanner. L'ISCP permettra quant à elle de faire de l'imagerie dite de "K-Hedge". "Le but est d'obtenir des reconstructions plus complexes, basées non plus sur deux, mais sur plusieurs autres matériaux, remarque le Pr Douek. On sait par exemple que le gadolinium a une atténuation très importante autour de 50keV, l'iode autour de 30 keV, l'or autour de 60kev. Ces données permettront de faire une imagerie spécifique de chacun de ces matériaux, ouvrant la voie à une imagerie moléculaire froide, avec des images en couleurs pour identifier les différents matériaux. Et cela peut aboutir à une alternative au PET-scan."
Des applications en oncologie, vasculaire ou ostéo-articulaire
Les applications de l'ISCP espérées aujourd'hui sont donc assez larges. "On peut imaginer détecter plus précisément, avec cette technologie, les pathologies de l'athérosclérose et de la plaque vasculaire instable ou certaines affections ostéo-articulaires, conclut-il. En oncologie, on peut imaginer combiner un produit de contraste avec un marqueur de carcinome hépatique afin de diagnostiquer et réaliser un suivi thérapeutique de ce type de cancer." Ce sont d'ailleurs les axes de recherche qui sont mis en oeuvre actuellement sur les petits animaux au Cermep. Le prototype Philips, installé en mai 2015 pour un coût de 1,7M€, ressemble à un scanner normal avec un gantry classique, mais qui permet un champ d'acquisition encore étroit. Le projet de recherche est soutenu notamment par France Life Imaging (FLI), l'Université de Lyon 1, l'Institut polytechnique de Turin, l'University College of London, Bracco et Philips Healthcare.
Un nouveau projet européen, de recherche clinique celui-là, est prévu pour 2018, avec une dotation de 6,7M€, et verra l'installation d'un nouveau prototype Philips permettant des champs d'acquisition plus larges. Il sera concurrencé par une initiative américaine de même type, qui prend place au sein de la Mayo Clinic de Rochester (Minnesota) et mis en oeuvre sur du matériel Siemens. En attendant, je vous invite à vous rendre à Nancy les 25 et 26 janvier 2016 où le Pr Philippe Douek présentera les premières images issues de l'ISCP.
Bruno Benque