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Dr Jean-Philippe Masson (FNMR): Depuis 2007, une centaine de cabinets de radiologie ont fermé !

22/09/2014
De Bruno Benque

Suite à son élection, pour une période de trois ans, à la présidence de la Fédération Nationale des Médecins Radiologues (FNMR), Théma Radiologie a rencontré le Dr Masson pour un long entretien sur les sujets qui font débat actuellement au sein de la radiologie libérale. Les baisses de rémunérations, bien sûr, mais aussi les difficultés d'installation des jeunes radiologues, la mutualisation territoriale des activités radiologiques rurales, ou la qualité en téléradiologie, tels sont les thèmes que nous avons abordés, en continuité de l'action du président sortant, Jacques Niney.

Théma Radiologie  : Dr Masson, vous voilà président de la FNMR, dans un contexte défavorable pour l’ensemble du secteur, notamment en termes de valorisation des actes. Comment voyez-vous l’évolution de cet environnement  ?
Dr Jean-Philippe Masson  : L’évolution est clairement en rapport avec la situation économique, et les tendances n’annoncent rien de bon. Il faut savoir qu’entre 2007 et 2013, on nous a baissé de 700 millions la valeur des actes d’imagerie. La conséquence directe de ces décisions est illustrée par la fermeture d’une centaine de cabinets de radiologie depuis cette période.

"Aujourd'hui, même les cabinets pratiquant l'imagerie en coupe sont en déficit !"

T.R.  : Les baisses de rémunération sont-elles seules en cause  ?
Dr JP..M.  : En majorité, oui. Si l’on met de côté les départs en retraite non remplacés par des jeunes qui ne sont pas intéressés par une activité en milieu rural notamment, un grand nombre de petits cabinets ont cessé leur activité car ils ne pouvaient plus s’en sortir. Et le phénomène est en train de se répéter pour certaines structures pratiquant l’imagerie en coupe. Les forfaits techniques (FT) d’IRM ont été abaissés, et c’est encore pire pour le scanner, qui a vu le FT d’une deuxième région anatomique au cours du même examen valorisé seulement à 15%. Certaines de ces structures sont donc en déficit, et sont obligées de prélever sur l’acte intellectuel des radiologues pour pouvoir payer les frais de fonctionnement.

T.R.: Cette situation est-elle directement liée aux suites de l’Avenant 8 de la convention  ?
Dr JP.M.: Ça en fait partie, effectivement, mais il faut remercier Jacques Niney, mon prédécesseur, qui a négocié le plan pluriannuel afin de lisser les baisses de recettes, qui s’élèvent tout de même à 180 millions d’euros sur 3 ans. Ce plan a permis aux gestionnaires d’avoir une visibilité sur la pérennisation de leur activité et éviter de nouvelles ponctions brutales lors des PLFSS. Cela représente pour eux des sommes importantes, qui ne sont pas disponibles pour les investissements, ou pour l’embauche de manipulateurs ou secrétaires, lesquels sont autour de 35 000 dans les cabinets de radiologie. L’heure est à la rationalisation au maximum pour réduire les coûts.

"La fréquence de renouvellement des échographes est passée à 5 ans".

T.R.  : Vous évoquez les investissements, en matériels. Sont-ils globalement en baisse dans les structures privées  ?
Dr JP.M.  : Ils sont en tout cas moins fréquents. Les radiologues ne renouvellent plus le matériel aussi souvent qu’ils le voudraient. Par exemple, pour l’échographie, les machines étaient remplacées tous les 3 ans, pour suivre l’évolution technologique. Aujourd’hui, la fréquence de renouvellement est passée en moyenne à 5 ans. Cela se répercute évidemment aussi sur les industriels, qui connaissent pour la plupart des plans de restructuration. On le voit également sur les congrès, où les stands se réduisent fortement.

T.R.  : Est-ce vraiment une spécificité française  ?
Dr JP.M.  : Les observateurs étrangers le confirment, en tout cas. La valeur des actes d’imagerie en France est la plus basse de toute l’Europe. Mais le prix des modalités de mammographie numérisée, par exemple, qui sont des matériels de haute qualité, ont partout la même valeur marchande ! Concernant le scanner, comparé aux années 90, nous sommes capables aujourd’hui d’obtenir des informations décuplées, avec quelques 650 coupes par examen et des données volumiques. Or ces informations et leur traitement par le médecin sont aujourd'hui moins valorisées. D’autre part, la caisse nous dit qu’on fait top d’IRM ostéoarticulaires, alors que l’ASN nous demande de réduire les procédures utilisant les rayonnements ionisants. Il faut maintenant que les tutelles fassent preuve de cohérence!

"Certains directeurs d'hôpitaux ruraux ne veulent pas entendre parler de mutualisation"

T.R.  : Vous évoquiez les jeunes radiologues qui ne reprennent pas les cabinets. Le Projet Professionnel Commun (PPC) cher à la FNMR n’a-t-il pas d’influence sur eux  ?
Dr JP.M.  : Le fait est que les jeunes radiologues sont formés essentiellement en imagerie en coupe. Ils se montrent dès lors peu intéressés pour reprendre les activités conventionnelles. La FNMR essaie de les convaincre, au moyen du PPC, de se regrouper pour faire l’acquisition de modalités d’imagerie en coupe. Je crois beaucoup au PPC. Dans mon département de l’Aude par exemple, il est en train d’aboutir. Il faut mutualiser les moyens d’un petit hôpital, où les machines tournent insuffisamment mais existent, avec les cabinets environnants pour les faire travailler ensemble, dans un contexte et une structure juridique adaptés. Mais il faut que les directeurs d’hôpitaux jouent le jeu et comprennent que c’est le bien des patients. Certains sont ouverts et participent activement à de tels projets, mais d’autres refusent, par ego mal placé, par peur des syndicats ou pour répondre à des stratégies politiques locales.

"Le dumping sur les actes de téléradiologie nuit à la qualité de la prise en charge"

T.R.  : Quelle est la place de la téléimagerie dans le PPC  ?
Dr JP.M.  : La téléimagerie fait partie intégrante du PPC, mais dans une logique de territoire. Il doit y avoir des relations régulières entre le service demandeur et le téléradiologue. Ce dernier doit s’assurer que les protocoles d’acquisition soient régulièrement validés, et doit entretenir un rapport humain avec l’équipe.
Certains directeurs d’hôpitaux font appel à des sociétés commerciales basées à l’autre bout de la France, qui font du dumping sur les actes, ce qui totalement illégal, ou qui hébergent les données de santé anarchiquement. On ne peut pas faire de la radiologie de qualité à bas prix  !

T.R.  : Finissons justement par un couplet sur la qualité. Le projet Labelix cher à la FNMR a-t-il toujours autant d’adeptes  ?
Dr JP.M.  : Effectivement, puisque 100 à 120 structures sont labellisées ou en cours de labellisation, des cabinets, des cliniques et des GIE d’imagerie en coupe. D’ailleurs, le dernier référentiel Labelix comporte un chapitre entier consacré à la téléradiologie. Comme vous le voyez, la FNMR a un nouveau président, mais elle continue à promouvoir la qualité, avec des médecins compétents et réactifs, dans une discipline qui coûte cher, mais qui est un acteur économique national important.

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