Prédire l'apparition de migraines post-traumatiques grâce à un outil mathématique
MARDI 02 FéVRIER 2016
La théorie du désordre peut améliorer l'étude de l'anisotropie fractionnaire pour prédire les migraines post-traumatiques. C'est ce que nous montre une étude récente parue dans Radiology.

Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Radiology, les chercheurs utilisent un nouvel outil mathématique pour déterminer quels patients victimes d’une commotion cérébrale pourraient souffrir de migraines.
La recherche d'anisotrope fractionnaire par IRM encore incomplète
Les migraines post-traumatiques sont assez fréquentes chez les personnes qui souffrent de commotions cérébrales. Au cours des dernières années, les chercheurs ont eu recours au tenseur de diffusion par IRM, pour rechercher des anomalies dans les émissions de signaux électriques de la substance blanche du cerveau afin de les corréler avec des symptômes particuliers tels que les maux de tête. L’IRM peut être utilisée pour créer un histogramme de distribution de fréquence de l’ensemble du cerveau qui servira de base pour réaliser une anisotropie fractionnaire (FA), une mesure des flux acqueux à travers le cerveau. De la FA, les chercheurs peuvent évaluer les lésions de la substance blanche. Cependant, la FA seule présente encore certaines lacunes.
La théorie du désordre en complément de la FA
« La FA est une moyenne, a déclaré l’auteur de l’étude le Docteur Lea Alhilali de l’université du Pittsburgh Médical Center. Si un patient a une FA élevée avant l’accident et qu’il perd de la substance blanche lors d’un traumatisme, il pourrait encore avoir une FA normale ». Plutôt que d’utiliser la FA seule, les chercheurs ont analysé les résultats de l'IRM en utilisant la théorie de l'information, basée sur des lois mathématiques entourant le comportement des données comme elles sont récupérées, transférées ou stockées. Ainsi, la Shannon entropy, un modèle de théorie de l’information qui se penche sur les domaines de l’entropie (théorie du désordre) dans les systèmes complexes comme le cerveau, offre de meilleurs avantages que la FA dans l’analyse des histogrammes du cerveau, selon le Docteur Alhilali. « Un cerveau en bonne santé a une entropie élevée, poursuit-elle. En revanche, un patient qui présente des lésions de la substance blanche à la suite d’un traumatisme peut perdre une partie de cette complexité et donc avoir moins d’entropie. »
Des cartographies de FA pour comparer les différents cas pathologiques
Dans leur première étude à ce sujet, le Docteur Alhilali et ses collègues ont évalué la performance de la Shannon entropy comme outil de diagnostic sur les patients victimes d’une commotion cérébrale sans migraines post-traumatiques. Ils ont obtenus des cartographies de FA et des résultats de tests neurocognitifs chez 74 patients atteints de commotion cérébrale, dont 57 souffrant de migraines post-traumatiques et 17 sans maux de tête. Les cartographies de FA ont été obtenues d’après 22 personnes saines (dites contrôles) et 20 patients témoins souffrant de migraines. Les FA et les résultats de Shannon entropy ont été obtenus à partir d’histogrammes sur l’ensemble du cerveau d’après les comparaisons entre les patients souffrant de commotion cérébrale et les personnes-contrôles, puis entre les patients présentant des migraines post-traumatiques avec ceux sans migraines.
Mieux prévoir la survenue de migraines post-traumatiques
Cette méthode permet une meilleure évaluation des patients susceptibles de développer des migraines post-traumatiques. Les patients atteints d’une commotion cérébrale présentent une Shannon entropy significativement plus faible que les témoins. Les patients souffrant de migraines post-traumatiques présentent un Shannon entropy encore plus faible que les patients sans maux de tête. En corrélant, à postériori, Shannon entropy avec le temps de récupération des patients, les chercheurs ont mis en évidence que les personnes présentant une entropie plus faible mettent plus de temps à se rétablir. Les résultats suggèrent que la Shannon entropy peut fournir un biomarqueur reproductible capable d’effectuer seul des calculs systématiques afin d’améliorer le suivi des patients après une lésion traumatique et de prévoir quels sont ceux qui seront susceptibles de développer des symptômes plus graves.
« Cette approche nécessite simplement un histogramme de l’ensemble du cerveau, conclut le Docteur Alhilali. Si elle continue d’être aussi prometteuse, alors l’examen pourrait être ajouté à l’IRM cérébrale régulière prescrite dans le cadre de l’étude ». Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour étudier d’autres applications potentielles de la Shannon entropy, comme prédire l’avenir de la performance cognitive chez les patients victimes d’une commotion cérébrale.
Pauline Mayol avec RSNA