Les traitements anti-inflammatoires de l'arthrose semblent aggraver la mal
MERCREDI 30 NOVEMBRE 2022
Bien qu’ayant un effet soulageant la douleur, la prise d'analgésiques anti-inflammatoires dans les cas d’arthrose peut aggraver l'inflammation de l'articulation du genou avec le temps. Une nouvelle étude présentée au RSNA 2022 en a fait la démonstration
L'arthrose est une affection qui altère petit à petit le cartilage des articulations, le plus souvent au niveau des mains, des hanches et des genoux et qui peut être très douloureuse. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont couramment prescrits pour la douleur et l'inflammation de l'arthrose. Mais on sait peu de choses sur les effets à long terme de ces médicaments sur la progression de la maladie.
Une étude évalue l’influence du traitement par AINS sur la progression de la sinovite
C’est dans ce cadre que le Dr Johanna Luitjens, chercheuse postdoctorale au Département de radiologie et d'imagerie biomédicale de l'Université de Californie à San Francisco, et ses collègues ont entrepris d'analyser l'association entre l'utilisation d'AINS et la synovite chez les patients souffrant d'arthrose du genou afin d'évaluer comment ce traitement affecte la structure articulaire au fil du temps.
« À ce jour, aucune thérapie curative n'a été approuvée pour guérir ou réduire la progression de l'arthrose du genou, précise le Dr Luijtens. Les AINS sont fréquemment utilisés pour traiter la douleur, mais la question de savoir comment leur utilisation influence les résultats pour les patients souffrant d'arthrose reste un débat ouvert. En particulier, l'impact des AINS sur la synovite n'a jamais été analysé à l'aide de biomarqueurs structuraux basés sur l'IRM. La synovite intervient dans le développement et la progression de l'arthrose et peut être une cible thérapeutique, poursuit-elle. Par conséquent, l'objectif de notre étude était d'évaluer l’influence du traitement par AINS sur la progression de la synovite et d'étudier si les biomarqueurs d'imagerie du cartilage, qui reflètent les changements dans l'arthrose, sont impactés par le traitement par AINS. »
Aucun mécanisme de protection des AINS pour réduire l’inflammation
Pour cette étude, 277 participants de la cohorte de l'Osteoarthritis Initiative souffrant d'arthrose modérée à sévère et d'un traitement soutenu par AINS pendant au moins un an et suivis pendant quatre ans ont été inclus dans l'étude et comparés à un groupe de 793 participants témoins qui étaient non traité avec des AINS. Tous les participants ont subi une IRM 3T du genou initialement et après quatre ans de suivi Les images ont été taguées pour les biomarqueurs de l'inflammation.
L'épaisseur du cartilage, sa composition et d'autres mesures IRM ont servi de biomarqueurs non invasifs pour évaluer la progression de l'arthrite. Les résultats n'ont montré aucun avantage à long terme pour l'utilisation des AINS. L'inflammation articulaire et la qualité du cartilage étaient pires au départ chez les participants prenant des AINS, par rapport au groupe témoin, et se sont aggravées après un suivi de quatre ans. « Dans ce grand groupe de participants, nous avons pu montrer qu'il n'y avait aucun mécanisme de protection des AINS pour réduire l'inflammation ou ralentir la progression de l'arthrose de l'articulation du genou, remarque Dr Luitjens. L'utilisation des AINS pour leur fonction anti-inflammatoire s'est fréquemment propagée chez les patients souffrant d'arthrose ces dernières années et devrait être revisitée, car un impact positif sur l'inflammation articulaire n'a pas pu être démontré. »
L’activité physique permise par les anti-inflammatoires comme possible facteur aggravant
Selon ce praticien, il existe plusieurs raisons possibles pour lesquelles l'utilisation d'AINS augmente la synovite. « D'une part, l'effet anti-inflammatoire qui provient normalement des AINS peut ne pas prévenir efficacement la synovite, avec un changement dégénératif progressif entraînant une aggravation de la synovite au fil du temps. D'un autre côté, les patients qui ont une synovite et qui prennent des analgésiques peuvent être physiquement plus actifs en raison du soulagement de la douleur, ce qui pourrait potentiellement entraîner une aggravation de la synovite, bien que nous ayons ajusté l'activité physique dans notre modèle. »
De nouvelles études prospectives randomisées devraient être réalisées à l'avenir pour fournir des preuves concluantes de l'impact anti-inflammatoire des AINS. Ce travail a été présenté au RSNA 2022.
Bruno Benque avec RSNA