La perte musculaire temporale pourrait être un signe avant-coureur d'Alzheimer
JEUDI 12 DéCEMBRE 2024
Existe-t-il un lien entre la perte de masse musculaire temporale et la survenue de la maladie d’Alzheimer ? C’est ce qu’ont tenté de prouver des chercheurs américains dans une étude qu’ils ont présentée lors du congrès de la RSNA 2024. À partir d’une segmentation du muscle temporal sur des images d’IRM cérébrale, ils ont pu identifier une perte musculaire qui serait un signe avant-coureur de l’apparition de la maladie d’Alzheimer.

L’être humain de cesse de perdre de la masse musculaire squelettique à mesure qu’il vieillit. Cette perte musculaire squelettique liée à l'âge est souvent observée chez les personnes âgées atteintes de démence due à la maladie d'Alzheimer mais aucun lien n’a semble-t-il été établi entre ces deux phénomènes.
Un lien entre la perte de masse musculaire temporale et la survenue de la maladie d’Alzheimer
Une étude présentée lors du congrès 2024 de la RSNA a tenté de savoir si la perte musculaire temporale, c’est à dire le muscle responsable du mouvement de la mandibule, était réellement associée à un risque accru de démence due à la maladie d’Alzheimer dans cette population, étant donné que l’épaisseur et la superficie des muscles temporaux peuvent être un indicateur de perte musculaire dans tout le corps.
« La mesure de la taille du muscle temporal en tant qu'indicateur potentiel de l'état généralisé des muscles squelettiques offre une opportunité de quantification des muscles squelettiques sans coût ni travail supplémentaire chez les personnes âgées ayant fait l’objet d’une IRM cérébrale pour une maladie neurologique, telle qu'une démence légère, explique l'auteur principal de l'étude, le Dr Kamyar Moradi, chercheur postdoctoral au département de radiologie et des sciences radiologiques Russell H. Morgan de la faculté de médecine de l'université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland ) USA). Il s’agit de la première étude longitudinale démontrant que la perte musculaire squelettique peut évoquer le développement de la démence. »
Une segmentation du muscle temporal sur des images d’IRM cérébrale pour étayer les recherches
Pour cette étude pluridisciplinaire, le Dr Moradi et ses collègues ont utilisé des examens d'IRM cérébrale de base de la cohorte de l'Alzheimer's Disease Neuroimaging Initiative pour quantifier la perte musculaire squelettique chez 621 participants sans démence (âge moyen de 77 ans). Ils ont segmenté manuellement le muscle temporal bilatéral sur des images IRM et ont calculé la surface transversale totale (CSA) de ces muscles.
Les participants ont été classés en deux groupes distincts : les grands CSA (131 participants) et les petits CSA (488 participants). Les résultats comprenaient l'incidence ultérieure de la démence due à la maladie d’Alzheimer, la modification des scores cognitifs et fonctionnels et les modifications du volume cérébral entre les groupes. Le suivi médian était de 5,8 ans.
La détection de la perte musculaire temporale serait un signe avant-coureur de l’apparition de la maladie d’Alzheimer
D’après leur analyse, un CSA temporal plus petit était associé à un risque d’incidence plus élevé de démence due à la maladie d’Alzheimer, mais aussi à une diminution plus importante du score composite de mémoire, du score du questionnaire d'activité fonctionnelle et des volumes structurels du cerveau au cours de la période de suivi.
« Nous avons constaté que les personnes âgées ayant des muscles squelettiques plus petits sont environ 60 % plus susceptibles de développer une démence, après ajustement pour tenir compte d'autres facteurs de risque connus », ajoute le Pr Marilyn Albert, co-auteure principale de l'étude et professeur de neurologie. Le Dr Shadpour Demehri, co-auteur principal et professeur de radiologie, rapporte quant à lui que ce changement musculaire peut être analysé de manière opportuniste par n'importe quelle IRM cérébrale conventionnelle, même lorsqu'elle est réalisée à d'autres fins, sans encourir de coûts ou de charges supplémentaires.
Ce travail montre que la détection précoce grâce à l'IRM cérébrale facilement disponible pourrait permettre des interventions rapides pour lutter contre la perte musculaire squelettique, comme l'activité physique, l'entraînement en résistance et le soutien nutritionnel. « Ces interventions peuvent aider à prévenir ou à ralentir la perte musculaire et, par conséquent, à réduire le risque de déclin cognitif et de démence », conclut le Drt Demehri.
Paco Carmine