Une protéine secondaire à l'insuffisance cardiaque responsable de troubles cérébraux ?
JEUDI 08 DéCEMBRE 2016
Un marqueur sanguin peptidique pourrait mettre en corrélation des pathologies cérébrales secondaires à une insuffisance cardiaque. C’est l’hypothèse qui résulte d’une étude néerlandaise publiée dans la revue Radiology qui suppose que des troubles fonctionnels de la barrière hémato-encéphalique sont en cause.

Les maladies cardiaques et les maladies cérébrales représentent un fardeau majeur pour la société, et l'incidence devrait augmenter considérablement en raison du vieillissement rapide de la population.
Des maladies cardiaque et cérébrale apparaissant au stade subclinique
Les lésions des deux organes se produisent souvent à un stade subclinique, ou avant que les signes et les symptômes de la maladie soient évidents. Un marqueur sanguin, révélateur de la maladie cardiaque subclinique et des maladies cérébrales comme l'AVC ou la démence, pourrait accélérer la mise en place des traitements et des changements de style de vie, ralentissant potentiellement, voire inversant le cours de la maladie.Les niveaux d'une protéine sanguine associée à une maladie cardiaque sont également liés à des dommages cérébraux au stade précoce, selon une étude publiéet en ligne dans la revue Radiologie.
Un marqueur peptidique identifié dans des études antérieures
Un marqueur prometteur est le peptide natriurétique N-terminal de type Pro-B (NT-proBNP), une protéine libérée dans le sang en réponse au stress de la paroi cardiaque. Les niveaux sériques de NT-proBNP augmentent lorsque l'insuffisance cardiaque s'aggrave et diminue quand elle s'améliore. Bien que des études antérieures aient montré un lien entre les pathologies cardiaque et cérébrale, on connaît moins l'association entre NT-proBNP et l’ensemble des marqueurs des lésions cérébrales subcliniques en imagerie, comme le volume du cerveau ou l'intégrité de la substance blanche.
Une étude néerlandaise identifie une relation entre les pathologies cardiaque et cérébrale
Des chercheurs des Pays-Bas ont enquêté récemment sur une possible corrélation auprès de 2 397 personnes d’âge moyen, vivant en milieu communautaire, sans diagnostic clinique de démence ni de maladie cardiaque. Les patients ont été tirés de l'étude de Rotterdam, une étude continue basée sur la population de plus de 10.000 personnes d'une banlieue de Rotterdam aux Pays-Bas. Lorsque les chercheurs ont comparé les niveaux sériques de NT-proBNP avec les résultats de l'IRM, ils ont découvert une association claire entre les niveaux plus élevés de NT-proBNP et les dommages cérébraux.
"Nous avons constaté que des niveaux sériques plus élevés de NT-proBNP étaient associés à des volumes de cerveau plus petits, en particulier avec un volume de matière grise plus petit et à une organisation plus pauvre de la substance blanche du cerveau", a déclaré le Dr Meike W. Vernooij, neuroradiologue à l'Erasmus MC University Medical Center de Rotterdam et auteur principal de l'étude. "Les résultats impliquent un lien étroit entre le cœur et le cerveau, même chez les personnes vraisemblablement en bonne santé", a-t-il ajouté.
Des troubles fonctionnels de la barrière hémato-encéphalique comme hypothèse
Il existe plusieurs hypothèses pour expliquer le lien entre un dysfonctionnement cardiaque et des lésions cérébrales subcliniques, selon le Dr Vernooij. Par exemple, une diminution de la circulation sanguine pourrait conduire à des dommages microvasculaires cérébraux ou à des problèmes fonctionnels de la barrière hémato-encéphalique, un réseau de vaisseaux sanguins qui acheminent les nutriments essentiels vers le cerveau tout en bloquant les substances potentiellement nocives. Les facteurs inflammatoires associés au stress cardiaque pourraient également nuire à la barrière, entrainant une perméabilité accrue et des lésions cérébrales.
Alors que la NT-proBNP est actuellement utilisée dans un contexte clinique pour écarter l'insuffisance cardiaque, il est trop tôt pour dire si elle peut jouer un rôle similaire pour les lésions cérébrales subcliniques, la nouvelle étude n’explorant les patients que ponctuellement. "Nous ne pouvons pas exclure que les lésions cérébrales subcliniques observées ont conduit à des niveaux accrus de NT-proBNP, a déclaré le Dr Vernooij. Cependant, d'un point de vue biologique, et d’après des études animales, il est plus probable que la dysfonction cardiaque affecte les changements cérébraux plutôt que l’inverse."
D'autres recherches, y compris des études de suivi du cerveau par IRM et des mesures de NT-proBNP, seront nécessaires, d’après les chercheurs, pour clarifier la relation entre le dysfonctionnement cardiaque et la maladie cérébrale subclinique.
Bruno Benque avec RSNA