La radiologie libérale française se mobilise pour le congrès Imagine 2025
MERCREDI 29 JANVIER 2025
Voilà quelques temps que nous n’avions pas évoqué, dans nos colonnes, les problématiques liées à la radiologie libérale française. Un an après la réforme de l’approvisionnement en produits de contraste et alors que le PLFSS est en discussion au parlement, nous avons rencontré le Dr Jean-Philippe Masson, Président de la FNMR, pour un tour d’horizon des affaires radiologiques et pour qu’il nous donne ses premières réflexions sur le 1er congrès de la radiologie libérale française qui verra bientôt le jour.

Thema Radiologie : La réforme issue du Décret du 18 décembre 2023 modifiant les conditions de prise en charge et de distribution de certains médicaments nécessaires à la réalisation d'examens d'imagerie médicale, communément appelée « Réforme des produits de contraste » est en vigueur depuis près d’un an maintenant. Il semble que les acteurs du secteur aient bien digéré les nouvelles contraintes qui se sont posées à eux et que le marché se soit stabilisé ?
Dr Jean-Philippe Masson : Il semble en effet que tout le monde ait repris son rythme de croisière dans ce domaine. Mais cela a nécessité des efforts pour les radiologues, des problèmes de coûts notamment liés à l’évolution des systèmes d’injection multi-patients ou certaines complications çà et là. Il existe notamment des problèmes d’approvisionnement pour les petits volumes, mais le problème majeur vient des produits barytés qui ne sont plus remboursés. La société Guerbet, qui commercialise ces produits, est responsable de ce dysfonctionnement. Elle a tout de même annoncé une baisse des tarifs mais, comme ces produits sont déremboursés, les officines peuvent appliquer les prix qu’ils souhaitent.
"300 millions d'économie sur le budget de la radiologie, c'est totalement inacceptable !"
T.R. : Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) 2025 est en cours de discussion au parlement. Qu’attendez-vous des politiques sur le plan des budgets alloués à la radiologie ?
Dr J-P.M. : Nous sommes, en fait, dans l’incertitude totale, puisque le Ministère ne répond plus, ce qui est compréhensible étant donnée la valse des Ministres à laquelle nous avons assisté ces derniers mois. Nous avons évité les baisses tarifaires lors de la réforme des produits de contraste, mais aux dernières nouvelles, les caisses d’assurance maladie ont annoncé vouloir faire 300 millions d’économies sur la radiologie, ce qui totalement inacceptable. Nous travaillons depuis quelques années sur la pertinence des examens, suite aux accords avec l’UNCAM, mais nous nous confrontons sur ce thème aux demandes non qualitative des correspondants.
T.R. : Mais dans le cas d’une demande d’examen mal formulée ou ne correspondant pas au contexte clinique, le radiologue se doit, de lui-même de ne pas pratiquer ledit examen ?
Dr J-P.M. : C’est ce qu’il se passe dans de nombreuses situations mais il est difficile d’annoncer à une patiente de 70 ans qui a eu un rendez-vous d’IRM du genou après un délai de deux mois que, finalement, son IRM ne sera pas pratiquée car non justifiée. Pour que cela n’arrive plus, il faut mettre en place un plan de communication grand public, pour acculturer les populations, mais aussi de formation auprès des médecins généralistes. Les caisses, comme les sociétés de radiologues, doivent travailler en ce sens. On voit par exemple que le message sur la limitation des antibiotiques porte aujourd’hui ses fruits.
"Le 1er congrès de la radiologie libérale traitera des affaires professionnelles, de l'IA, de l'innovation et proposera également des formations"
T.R. : Vous annonciez dernièrement dans un communiqué l’organisation prochaine d’un congrès de la radiologie libérale. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet ?
Dr J-P.M. : Nous sommes partis du constat que la radiologie libérale avait besoin de faire parler d’elle, notamment auprès de la communauté radiologique et interdisciplinaire. Nous avons ainsi réfléchi à l’organisation d’un congrès où seraient abordés des sujets liés aux affaires professionnelles, tant pour les radiologues libéraux qu’hospitaliers. Nous souhaitons notamment mettre en valeur le concept que j’appelle de « l’escargot » issu d’une étude médico-économique sur la spécialité de radiologie. Elle représente bien entendu un coût pour la société mais, en contrepartie, elle crée de la richesse, par la mise en production de matériels souvent lourds, par des activités professionnelles diverses, et elle est source d’économie, puisqu’une pathologie identifiée précocement permet de ne pas avoir recours, à distance, à des traitements lourds et coûteux pour la société. Une partie du congrès sera orientée autour de cet « escargot ».
T.R. : Ce congrès, intitulé « Imagine 2025 », ne durera qu’une journée, le 20 juin 2025 à Paris. Y aura-t-il de la place pour des contenus scientifiques ?
Dr J-P.M. : Tout à fait, des sujets scientifiques autour de l’innovation et de l’IA sont prévus pour cette journée. On parlera de la radiologie, source d’innovation, de l’IA sur son versant éthique, avec des interventions courtes et dynamiques et des symposiums proposés par nos partenaires industriels. Je ne peux pas aujourd’hui annoncer précisément les contenus qui seront proposés, mais je peux dire d’ores et déjà que nous mettrons en place des sessions de formation, en particulier sur le thème du dépistag du cancer du poumon.
T.R. : Quels profils de professionnels attendez-vous pour participer à « Imagine 2025 » ?
Dr J-P.M. : Cette journée ne sera pas ouverte qu’aux radiologues. Nous attendons une représentation pluridisciplinaire, notamment des cardiologues, avec qui nous partageons des équipements, ainsi qu’aux pneumologues certainement, avec qui nous pilotons le projet de dépistage du cancer du poumon par scanner low-dose. Je profite de l’occasion pour rappeler que les radiologues libéraux, comme pour l’étude CASCADE précédente, participera au projet de recherche IMPULSION. L’INCa aura besoin de la représentativité libérale pour explorer les 20 000 patients inclus dans cette étude. J’en profite également pour dire le fond de ma pensée sur ce projet, qui retarde encore le déploiement d’un dépistage en conditions réelles, alors que de nombreuses études étrangères ont démontré l’efficacité d’un tel processus.
Propos recueillis par Bruno Benque