Les vrais chiffres de la consommation électrique de l'interventionnel en mode repos
JEUDI 04 AVRIL 2024
Selon une toute nouvelle recherche publiée dans l'American Journal of Roentgenology (AJR), la mise hors tension des systèmes d'imagerie interventionnelle inutilisés en présente des avantages substantiels en matière de durabilité environnementale. Les chercheurs ont obtenu des résultats significatifs en installant des capteurs de puissance sur les modalités d’imagerie interventionnelle.

En 2022, l’Agence internationale de l’énergie a déclaré que le monde se trouvait dans sa première crise énergétique mondiale, décrite comme étant d’une ampleur et d’une complexité sans précédent. Combinée aux problématiques de réchauffement climatique, cette situation provoque l’intérêt général pour la réévaluation de la consommation énergétique des différents secteurs professionnels et la mise en œuvre de stratégies opérationnelles durables.
Mettre les modalités d’imagerie médicale hors tension lorsqu’elles sont inactives pour réduire la consommation électrique
Paradoxalement, alors que le secteur de la santé devra faire face aux effets néfastes du changement climatique sur la santé de la population, ce secteur est également un contributeur majeur, nous l’avons déjà évoqué dans nos colonnes, à la crise climatique. Son empreinte carbone mondiale représente collectivement environ 4,0% à 8,5% des émissions mondiales de CO2, avec l’imagerie médicale constitue parmi les plus gros consommateurs d’énergie et contributrice d’émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Étant donné que la proportion dominante de la consommation totale d’énergie des systèmes d’imagerie en coupe ou de radiologie interventionnelle se produit pendant les périodes non productives, il a été conclu que le moyen le plus simple d’obtenir des avantages substantiels en matière de durabilité et d’économies de coûts électriques est de mettre ces systèmes hors tension lorsqu’ils ne sont pas utilisés.
Évaluation des économies potentielles permises par des ajustements opérationnels
Pour la radiologie interventionnelle (RI) et la cardiologie interventionnelle (CI) en particulier, la production de déchets est aussi à surveiller. D’autre part, la demande énergétique de ces systèmes d’imagerie interventionnelle a toujours été estimée sur la base des spécifications de puissance moyenne fournies par les fabricants et les centres doivent laisser au moins une de ses installations fonctionner en mode veille 24 heures sur 24 afin de répondre aux urgences aiguës. C’est ainsi que des stratégies d’exploitation alternatives sont en réflexion pour réduire la consommation d’énergie et l’impact environnemental de ces systèmes.
Des chercheurs de l’Hôpital universitaire de Bâle (Suisse) ont publié une étude dans l’American Journal of Roentgenology (AJR) dont l’objectif était d’étudier la consommation d’énergie des systèmes d’imagerie interventionnelle et d’évaluer les économies potentielles sur les émissions de carbone et sur les coûts d’électricité de ces systèmes grâce à des ajustements opérationnels hypothétiques.
Des capteurs de puissance installés sur chaque modalité de l’hôpital universitaire de Bâle
« Les systèmes d'imagerie interventionnelle sont gourmands en énergie, avec une consommation élevée en dehors des périodes d'acquisition d'images, précise le Dr Jan Vosshenrich, du service de radiologie de l'hôpital universitaire de Bâle. Des ajustements opérationnels stratégiques (par exemple, la mise hors tension des systèmes inactifs) peuvent réduire considérablement les émissions de carbone et les coûts d’électricité des systèmes d’imagerie interventionnelle. »
Le Dr Vosshenrich et son équipe ont installé des capteurs de puissance sur plusieurs installations, une salle de radiologie interventionnelle, une salle de neuroradiologie, une unité de radiologie et de fluoroscopie, deux cathlabs de cardiologie et deux unités de fluoroscopie en urologie. Ils ont enregistré les données durant une période de 4 semaines pour chaque système de radiologie et de cardiologie (du 1er juin au 28 novembre 2022) et pendant une période de 2 semaines pour chaque système d'urologie (du 31 juillet au 13 août 2023).
Une consommation d’énergie non productive avoisinant les 95%, en moyenne, de la consommation totale !
En utilisant diverses sources pour extraire les états d'alimentation, les horodatages des procédures et les heures de fluoroscopie, l'activité du système a ensuite été divisée en périodes éteinte, inactive (aucun patient dans la salle), active (patient dans la salle pour l'intervention) et imagerie nette (acquisition d'images fluoroscopiques actives). Après avoir calculé la consommation d'énergie annuelle projetée, les économies potentielles en matière d'émissions de carbone et de coûts d'électricité ont été estimées à l'aide des valeurs opérationnelles publiées.
Pour les sept systèmes d'imagerie interventionnelle inclus dans ce travail de recherche, la consommation d'énergie annuelle projetée variait de 3 646 à 26 576 kilowattheures (c'est-à-dire la consommation de 1 à 5 ménages de 4 personnes). Et la consommation d’énergie non productive représentait 89,2 à 99,4 % de la consommation totale. Les chercheurs ont remarqué que l’ajustement opérationnel hypothétique, impliquant la mise hors tension de tous les systèmes inactifs, permettrait d’obtenir des économies annuelles potentielles d’émissions de 18,6 millions de tonnes d’équivalent carbone.
Bruno Benque avec AJR