Radiographie pulmonaire : l'IA a des progrès à faire pour égaler le radiologue
LUNDI 25 SEPTEMBRE 2023
Dans une étude danoise publiée dans la Revue Radiology et portant sur plus de 2 000 radiographies pulmonaires, les chercheurs constatent que radiologues ont surpassé l’IA pour identifier avec précision la présence et l’absence de trois maladies pulmonaires courantes. Ils affirment que les outils d’IA actuels ne peuvent pas fournir un diagnostic fiable dans des conditions cliniques réelles.

Une étude danoise publiée dans la Revue Radiology et portant sur plus de 2 000 radiographies pulmonaires, se propose de comparer les performances des radiologues et de l’intelligence artificielle (IA) pour identifier avec précision la présence ou l’absence de pathologies pulmonaires courantes.
Des outils d’évaluation clinique encore à leurs balbutiements
« La radiographie thoracique est un outil de diagnostic courant, mais une formation et une expérience importantes sont nécessaires pour interpréter correctement les examens », le Pr Louis L. Plesner, radiologue résident au sein du département de radiologie de l'hôpital Herlev et Gentofte de Copenhague (Danemark). Bien que des outils d'IA disponibles dans le commerce et approuvés par la FDA soient disponibles pour aider les radiologues, le Pr Plesner constate que l'utilisation clinique d'outils d'IA basés sur le deep learning pour le diagnostic radiologique en est encore à ses balbutiements.
« Alors que les outils d’IA sont de plus en plus approuvés pour une utilisation dans les services de radiologie, il existe un besoin non satisfait de les tester davantage dans des scénarios cliniques réels, ajoute-t-il. Les outils d’IA peuvent aider les radiologues à interpréter les radiographies pulmonaires, mais leur précision diagnostique réelle reste incertaine. »
Une étude comparative pour la détection de trois pathologies pulmonaires courantes
Le Dr Plesner et son équipe ont comparé les performances de quatre outils d'IA disponibles dans le commerce avec un groupe de 72 radiologues pour interpréter 2 040 radiographies pulmonaires consécutives d'adultes (âge médian 72 ans), prises sur une période de deux ans dans quatre hôpitaux danois en 2020. Parmi les radiographies pulmonaires de l'échantillon, 669 (32,8 %) présentaient au moins une pathologie. Les radiographies ont été évaluées pour trois résultats courants : maladie de l'espace aérien (causé par une pneumonie ou un œdème pulmonaire), un pneumothorax et un épanchement pleural.
Les outils d’IA ont atteint des taux de sensibilité allant de 72 à 91 % pour les maladies de l’espace aérien, de 63 à 90 % pour le pneumothorax et de 62 à 95 % pour l’épanchement pleural. « Les outils d'IA ont montré une sensibilité modérée à élevée, comparable à celle des radiologues pour détecter les maladies de l'espace aérien, le pneumothorax et l'épanchement pleural sur les radiographies pulmonaires, poursuit le Pr Plesner. Cependant, ils ont produit plus de faux positifs que les radiologues et leurs performances ont diminué lorsque plusieurs pathologies étaient présentes et pour des lésions de petite taille. »
De nombreux faux positifs et des situations complexes non identifiées par l’IA
Pour le pneumothorax, les valeurs prédictives positives pour les systèmes d'IA variaient entre 56 et 86 %, contre 96 % pour les radiologues. « L'IA a obtenu les pires résultats dans l'identification des maladies de l'espace aérien, avec des valeurs prédictives positives comprises entre 40 et 50 %, remarque le Pr Plesner. Dans cet échantillon de patients difficiles et âgés, l’IA a prédit une maladie de l’espace aérien là où aucune n’était présente cinq à six fois sur dix. Vous ne pouvez pas avoir un système d’IA fonctionnant seul à ce rythme-là ! Les systèmes d’IA semblent très efficaces pour détecter les maladies, mais ils ne sont pas aussi efficaces que les radiologues pour identifier l’absence de maladie, en particulier lorsque les radiographies pulmonaires sont complexes. Trop de diagnostics faussement positifs entraîneraient une imagerie inutile, une exposition aux radiations et une augmentation des coûts. »
Le Pr Plesner constate que la plupart des études tendent généralement à évaluer la capacité de l’IA à déterminer la présence ou l’absence d’une seule maladie, ce qui est une tâche beaucoup plus facile que des scénarios réels dans lesquels les patients présentent souvent plusieurs pathologies.
Des outils efficaces pour identifier les radiographies pulmonaires normales
« Dans de nombreuses études antérieures affirmant la supériorité de l'IA sur les radiologues, les radiologues examinaient uniquement l'image sans accès aux antécédents cliniques du patient et aux études d'imagerie antérieures, ajoute-t-il. Dans la pratique quotidienne, l’interprétation d’un examen d’imagerie par un radiologue est une synthèse de ces trois données. Nous pensons que la prochaine génération d’outils d’IA pourrait devenir beaucoup plus puissante si elle était également capable de réaliser cette synthèse, mais de tels systèmes n’existent pas encore. »
« Notre étude démontre que les radiologues surpassent généralement l'IA dans des scénarios réels où il y a une grande variété de patients, conclut-il. Bien qu'un système d'IA soit efficace pour identifier les radiographies pulmonaires normales, l'IA ne devrait pas être autonome pour établir des diagnostics. »
Bruno Benque avec RSNA