L'intelligence artificielle au révélateur de l'imagerie oncologique
MARDI 12 NOVEMBRE 2019
Dans notre série d’articles dédiés au prochain symposium Scanner volumique, nous allons à la rencontre des orateurs qui animeront cet événement. Aujourd’hui, le Pr Pierre-Jean Valette évoque pour nous l’intelligence artificielle appliquée à l’imagerie oncologique, un thème qu’il abordera lors du symposium.

L’Intelligence Artificielle (IA) est une notion désormais omniprésente dès lors que l’on évoque l’imagerie médicale. Elle est déclinée à toutes les sauces, souvent porteuse de réelles promesses mais aussi parfois de perspectives abusives. Il en sera question lors du IXème Symposium Scanner volumique qui se tiendra les 7 et 8 janvier 2019 à Nancy.
Pour le Pr Pierre-Jean Valette, spécialisé en imagerie diagnostique et interventionnelle digestive, il s’agit dès à présent d’un outil qu’il utilise dans le cadre de projets de recherche. « Je participe à un travail collaboratif de recherche, avec la société Philips notamment, dont l’objectif est de permettre l’identification de lésions, de métastases ou de polykystose hépatiques au travers d’un algorithme d’IA, précise-t-il. Nous sommes ainsi en passe d’élaborer des systèmes capables d’assurer un suivi RECIST automatique de métastases hépatiques sous traitement médical. Nous envisageons également des travaux sur la texture des tissus dans lequel le scanner spectral pourrait trouver une application intéressante ».
Quatre manières d’aborder l’intelligence artificielle appliquée à l’imagerie oncologique
Le Pr Valette a une vision un peu décalée de l’IA appliquée à la médecine. Il voit en effet quatre manières d’aborder cette thématique. L’approche technique tout d’abord, qui reste une affaire d’informaticiens, l’approche scientifique ensuite, par laquelle on étudie comment et à quel point l’IA pourrait devenir un outil collaboratif efficace pour les activités de routine ou de recherche en imagerie. Il évoque par ailleurs l’approche pratique, ou comment le métier des radiologues va évoluer avec le développement de l’IA, et enfin l’approche philosophique, qui est sans doute la plus intéressante pour lui, car elle conduit à se poser la question des limites de l’IA.
L’intelligence artificielle dépassera l’humain dans certains domaines mais ne pourra pas le remplacer
La grande force de l’IA vient certes, selon le Pr Valette, du fait qu’elle travaille vite, sans relâche et nourrie d’une mémoire infaillible. Mais les algorithmes sont entrainés de façon ciblée, par exemple pour repérer un type de lésion en oncologie, et ils trouvent rapidement leurs limites devant la diversité des diagnostics alternatifs possibles. Il convient également de considérer les particularités de l’IA du point de vue des théories de la connaissance. Les algorithmes peuvent être puissants, ils sont capables d’apprentissage, mais ils ne créent pas de savoir proprement dit. Les algorithmes raisonnent en effet de manière empirique et les raisons de leur décision restent impossibles à connaître, ce que certains désignent sous le terme de « boîte noire ».
Reste enfin, en pratique clinique, la comparaison entre l’intelligence humaine et l’IA en termes de processus décisionnel. « On entend, ça et là, des observateurs annoncer la disparition des radiologues, remarque le Pr Valette. Mais où cela nous mènera-t-il ? Un système sera sans doute capable d’identifier et d’analyser des lésions hépatiques, et ce faisant d’identifier un cancer du foie à partir d’images scanographiques ou d’IRM, mais la machine sera incapable de réaliser l’ensemble des activités humaines pour assurer un diagnostic de certitude. Les dimensions éthiques, esthétiques, émotionnelles, l’intuition du praticien, restent exclusivement humaines. Je prétends que le diagnostic du cancer du foie est le résultat d’images pathologiques, mais également des informations données par le patient, de son histoire, de ses antécédents. »
Le Pr Valette interviendra le vendredi 7 février 2020 lors du symposium Scanner volumique organisé au Centre de congrès Prouvé de Nancy. Les inscriptions sont accessibles ICI.
Le Programe:
Propos recueillis par Bruno Benque