Systèmes d’information et téléradiologie: plus de fluidité pour la gestion des urgences
MARDI 21 OCTOBRE 2014
Les JFR 2014 ont donc mis en lumière pendant quelques jours l’imagerie des urgences. Si les systèmes d'information rendent les flux de données plus fluides au sein d'un même établissement, les solutions utilisées en téléradiologie ne sont pas toujours interopérables, se qui crée de l’inertie dans les processus. Aïssa Khelifa, associé d'HMS, qui a participé aux JFR 2014 sur le thème de l’archivage neutre, nous parle de l’impact des systèmes d’information et de la téléradiologie sur la gestion des urgences.

Théma Radiologie: D'après votre expérience d’assistance à maîtrise d'ouvrage, quelles sont les solutions les mieux adaptées à la continuité de la prise en charge des urgences radiologiques ?
Aïssa Khelifa: Il n'y a pas, en fait, de solution idéale. On peut partir sur l’utilisation de prestataires de service ou rechercher une organisation locale ou régionale de la PDS en imagerie. Le prestataire apporte souvent un réel savoir-faire en termes de management et d’organisation mais utilise la plupart du temps un Système d’Information (SI) de téléradiologie propriétaire. L’organisation régionale est normalement plus interopérable mais nécessite un travail important d’organisation des radiologues.
T.R. : Des contraintes concernant les flux d'information existent elles également ?
A.K.: Effectivement, car les données cliniques saisies dans les logiciels des urgences ne sont pas toujours reconnues par les RIS ou les solutions de téléradiologie, par défaut d'interfaçage entre les outils. Il est alors nécessaire de les ressaisir dans le système de téléradiologie, au risque de faire des erreurs dans l'ID ou l'état clinique du patient. A l'heure de l'interopérabilité, il est regrettable que ces interconnexions ne soient pas encore effectives. Les éditeurs ont un rôle à jouer dans ce cas, puisque les RIS, qui en matière de SI sont généralement plus maîtres qu'esclaves, ont naturellement plus de facilité à émettre des messages qu’à en recevoir. De la même manière, les systèmes de téléradiologie ne sont pas bien interfacés avec les RIS. Ils génèrent leur propre worklist, ce qui peut créer une certaine inertie entre le moment où la demande est effectuée et l'identification, par le téléradiologue, d'un examen à interpréter.
T.R.: Les règles de confidentialité des données sont-elles facilement appliquées dans un contexte d'urgence ?
A.K.: C’est absolument indispensable. Non seulement la confidentialité des données doit être garantie, mais l’ensemble des droits des patients, y compris leur consentement éclairé. Dans le cas où les images sont physiquement téléchargées, celui qui les reçoit pour interprétation devrait effectivement posséder l’agrément "hébergeur de données de santé", ce qui n'est pas souvent le cas. Mais, la plupart du temps, les examens sont visionnés en streaming, ce qui permet de contourner cette règle. La CNIL devrait s'emparer de ce dossier prochainement. Le problème, c'est que les examens arrivent quelquefois incomplets chez le téléradiologue.
T.R. : Pour sortir un peu du contexte de la téléradiologie, en quoi les TIC créent-ils de la fluidité, au sein d'un établissement de santé, entre les unités d'urgences et les services d'imagerie ?
A.K.: Outre le fait que les lecteurs de plaques et les scanners sont quelquefois implantés au plus près du patient dans ou à proximité du service des urgences, la visualisation des images sur le PACS aussitôt leur acquisition réalisée crée incontestablement de la fluidité. Le transfert électronique du compte-rendu engendre également de l'efficience, dans le cas où le radiologue est sur place. Dans le cas contraire, ce flux est dépendant, comme nous l'avons exposé précédemment, de l'interopérabilité des logiciels.
T.R. : Des outils d'aide à la décision comme les CAD ne favoriseraient-ils pas une prise en charge plus rapide ?
A.K.: Je ne pense pas. Le CAD reste un outil d’accompagnement de l’interprétation et ne substitue pas au travail médical. Par contre, l'avènement de la téléradiologie entraine quelques changements de pratiques pour les urgentistes en termes de responsabilité médicale. En fait chaque établissement adopte sa propre organisation et il est primordial d'accompagner ces changements et de réguler une offre à géométrie variable. L'important est d'identifier les risques, qui sont souvent opérateurs dépendants, avant qu'ils n'entravent les processus. Comme souvent dans les projets de SIS, la gestion du changement est plus importante que les aspects technologiques proprement dits.
Bruno Benque