La HAS retoque le scanner low-dose pour le dépistage du cancer du poumon
JEUDI 19 MAI 2016
La Haute Autorité de Santé (HAS) a publié un rapport dans lequel le dépistage du cancer du poumon par scanner low-dose est considéré comme non pertinent. Parmi les arguments avancés, les nombreux faux positifs et les risques de cancers radio-induits générés par la technique.

Dans le cadre du 3ème Plan cancer 2014-2019, la Haute Autorité de Santé (HAS) a évalué la possibilité et l’intérêt de dépister le cancer du poumon chez les fumeurs, dans le but de détecter et de traiter la maladie à un stade précoce.
La HAS mène une étude pour évaluer la pertinence du scanner low-dose…
A l'origine d’environ 45 200 nouveaux cas en France en 2015, le cancer du poumon est le cancer le plus meurtrier chez l’homme (21 000 décès) et le 2ème chez la femme (9 500 décès) après le cancer du sein. Cinq ans après le diagnostic de la maladie, moins d’un malade sur six est encore en vie. Alors que le tabagisme est de loin le principal facteur de risque de cancer du poumon, un adulte sur trois déclarait fumer quotidiennement en 2014. A la demande de professionnels de santé et dans le cadre du 3ème Plan cancer 2014-2019, la HAS a évalué la pertinence d’un dépistage du cancer du poumon par scanner thoracique low-dose chez les fumeurs. Elle a fondé cette évaluation sur une analyse critique et une synthèse des informations issues des essais menés chez les fumeurs, réalisées par une équipe de l’Inserm, avec la collaboration de spécialistes en épidémiologie des cancers et dans le domaine des rayonnements ionisants. Une synthèse de l’analyse des études est publiée aujourd’hui dans l’European Journal of Cancer.
…et conclut que les conditions ne sont pas réunies pour mener une campagne de dépistage
Dans un rapport publié le 19 mai 2016, la HAS conclut que les conditions ne sont actuellement pas réunies pour que ce dépistage soit possible et utile. Elle estime tout d'abord que la maladie est difficilement détectable à un stade précoce à cause de sa rapidité d’évolution. Ensuite, le scanner thoracique de dépistage génère trop de faux positifs (jusqu’à 90% des anomalies trouvées au scanner s’avèrent non cancéreuses après examen) et reste irradiant même à faible dose, avec un risque de cancers induits. Le rapport de la HAS précise d'autre part que les possibilités de traitements sont restreintes, même à un stade précoce de la maladie, que les personnes qui pourraient bénéficier d’un dépistage ne sont pas précisément identifiables, ou que la réduction de la mortalité grâce à ce dépistage n’est pas établie dans le contexte français. La HAS remarque enfin que le rapport bénéfice-risque est trop faible, des complications parfois graves voire mortelles suite à l’exploration d’anomalies non cancéreuses identifiées au scanner étant susceptibles de se manifester.
Des recommandations pour débuter des campagnes utilisant le scanner low-dose au États-Unis
Pourtant, le scanner low-dose comme outil principal du dépistage du cancer du poumon a fait l'objet de différentes études ces dernières années à travers le monde, notamment aux États-Unis pour la surveillance des nodules pulmonaires à type de verre dépoli. En France, le CHU de Nice, en coopération avec l'IRCAN et l'IOMC, a initié une étude appelée "Projet AIR", destinée à vérifier si les cellules tumorales circulantes peuvent être considérées comme des marqueurs de cancer du poumon en comparant, pour un échantillon de population précis, une prise de sang et un scanner low-dose. Des recommandations ont même été formulées pour débuter les campagnes de dépistage en Amérique du Nord, avec un remboursement d'un scanner low dose annuel pour les individus asymptomatiques âgés de 55 à 77 ans, qui ont des antécédents de fumeur à 30 paquets-années et sont encore fumeurs ou ont arrêté dans les 15 dernières années.
Mais la HAS a décidé, pour l'instant, de minorer la pertinence d'un tel examen de ce type et insiste sur la nécessité de poursuivre la recherche sur ce cancer et d’intensifier la lutte contre le tabagisme.
Bruno Benque