Lésions pulmonaires provoquées par le vapotage : un modèle scanographique identifié
MARDI 01 SEPTEMBRE 2020
Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Radiology : Cardiothoracic Imaging, les pathologies pulmonaires causées par le vapotage entrainent des imafges scanographiques caractéristiques. Ces modèles pourraient aider les médecins à poser des diagnostics précis et à réduire les biopsies inutiles.

Les systèmes électroniques de distribution de nicotine tels que les cigarettes électroniques et les vaporisateurs chauffent la nicotine, les arômes et autres produits chimiques pour créer un aérosol que l'utilisateur inhale. L'utilisation de ces appareils s'est rapidement développée au cours de la dernière décennie, en particulier chez les jeunes. Mais les aérosols inhalés peuvent contenir un certain nombre de substances potentiellement toxiques ou nocives.
Un syndrome pulmonaire spécifique au vapotage identifié au scanner
L'année dernière, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) américains ont reçu leur premier rapport sur une maladie connue sous le nom de lésions pulmonaires associées à l'utilisation de cigarettes électroniques ou de produits de vapotage (EVALI). Trois critères définissent EVALI : l'utilisation de la cigarette électronique ou le vapotage dans les 90 jours suivant l'apparition des symptômes, des anomalies sur l'imagerie thoracique et l'exclusion d'autres sources potentielles de maladies, notamment infectieuses. Près de 3000 cas EVALI hospitalisés ont été signalés aux CDC dans les six mois suivant le premier cas, avec 68 décès confirmés.
L'année dernière également, des pathologistes de la Mayo Clinic de Scottsdale (Arizona) ont publié un article décrivant un schéma particulier de lésions pulmonaires chez les jeunes utilisant des produits de vapotage. Les lésions étaient enroulées autour des bronches. Le radiologue de la Mayo Clinic, le Dr Michael B.Gotway, a récemment développé une étude, publiée dans la Revue Radiology, à la recherche de modèles sur les images de tomodensitométrie thoracique qui pourraient être en corrélation avec les résultats pathologiques observés précédemment.
Des images scanographiques caractéristiques corrélées à l’histopathologie
L'étude a inclus 26 patients qui répondaient aux critères EVALI et avaient subi une tomodensitométrie et une biopsie ou autre type de prélèvement tissulaire. Le Dr Gotway et ses collègues ont classé le modèle de tomodensitométrie selon plusieurs types différents reconnus. L'un des motifs est l'opacité en verre dépoli, une zone du scanner qui apparaît plus blanche que la normale mais n'obscurcit pas la structure sous-jacente du poumon. Un autre est la consolidation, soit des zones blanches plus denses sur le scanner.
« Nous avons lu le scanner, puis avons classé l’image selon l'un de ces modèles et corrélé cela avec l'histopathologie, précise le Dr Gotway. Ce que nous avons découvert, c'est que l'opacité en verre dépoli, parfois avec consolidation, est de loin le modèle le plus courant que nous observons avec EVALI. » Ce modèle a en effet été retrouvé plus fréquemment qu'un type d’image évoquant une pneumopathie subaiguë, par exemple. Les résultats de cette étude et d'autres recherches connexes pourraient fournir un outil de diagnostic important pour les médecins traitant de jeunes patients qui manifestent des symptômes tels que des douleurs thoraciques et un essoufflement.
Une avancée diagnostique qui pourrait limiter le nombre de biopsies pulmonaires
« Nous espérons faire prendre conscience aux radiologues que s'ils voient des opacités pulmonaires diffuses chez un patient plus jeune sans causes clairement définies, ils pourront peut-être envisager sérieusement que le patient pourrait avoir une lésion due au vapotage, remarque le Dr Gotway. Les patients peuvent ne pas admettre facilement qu'ils utilisent ce système, mais si un radiologue reconnaît ces modèles et dit ensuite au clinicien qu'il pourrait s'agir d'une lésion provoquée par le vapotage, alors peut-être qu'ils pourraient tester un métabolite de la nicotine ou interroger le patient à ce sujet. »
Une telle approche pourrait aider à réduire les biopsies pulmonaires, au coût médico-économique significatif et présentant un risque de complications pour le patient. « Ces résultats radiologiques seront particulièrement bénéfiques pour aider les médecins à déterminer des options de traitement potentiellement moins invasives, conclut le Dr Gotway. Nous pourrions potentiellement poser ce diagnostic de manière non invasive grâce à la coopération avec nos collègues cliniciens. En les alertant sur un modèle d’image scanographique suggérant la possibilité d'EVALI, nous pouvons en fait éviter aux patients d'avoir à rencontrer un chirurgien. »
Par ailleurs, les chercheurs ont découvert dans leur étude que les signes radiologiques d'EVALI peuvent disparaître rapidement avec l'arrêt du vapotage, en leur proposant en parallèle une corticothérapie.
Bruno Benque avec RSNA