Radioembolisation hépatique: de la difficulté à évaluer la dose administrée
MERCREDI 29 NOVEMBRE 2017
Évaluer la dose administrée lors d'une radioembolisation hépatique n'est pas chose aisée. Une étude parue dans European Radiology estime que la méthode BSA n'est pas recommandée dans les cas d'un faible volume de foie restant après chirurgie. Un algorithme basé sur le volume de foie est alors recommandé.

La radioembolisation hépatique à l'yttrium-90 (RE Y90) par microsphères de résine (SIR-Spheres®) est un mode de traitement fiable pour les tumeurs hépatiques primaires et secondaires, et est considérée comme sûre et efficace chez les patients non opérables.
La méthode BSA généralement utilisée pour évaluer la dosimétrie de la radioembolisaton
Le calcul de la radioactivité pour la RE Y90 est important pour un traitement précis, en termes de dose absorbée suffisante dans la tumeur, tout en épargnant le tissu hépatique sain. Pour l'usage des microsphères de résine Y90, les recommandations internationales recommandent la méthode Body Surface Area (BSA) pour déterminer la dose à appliquer.Bien que cette méthode soit populaire en raison de sa simplicité et qu'elle soit généralement sûre, des études ont montré qu'elle n'est pas bien corrélée au volume hépatique ou à la dosimétrie tumorale, en particulier dans les cas de charge tumorale très élevée ou très faible, pouvant conduire à un surdosage. Une réduction empirique de la dose a donc été recommandée pour les zones hépatiques restant après chirurgie.
Évaluer la variabilité de la dose appliquée au patients opérés du foie
L'objectif principal d'une étude internationale (Samim, M., van Veenendaal, L.M., Braat, M.N.G.J.A. et al. Eur Radiol (2017) 27: 4923) menée par le Pr Morsal Samim, de l'University Medical Center d'Utrecht (P-B) et publiée dans European Radiology, était d'évaluer la variabilité de dose appliquée à des patients ayant des antécédents de chirurgie hépatique entre des centres ayant une expérience approfondie des RE Y90 et de formuler des recommandations sur la prescription de dose. Pour cette étude, les données des patients ayant subi une RE Y90 avec des microsphères de résine et ayant des antécédents de chirurgie du foie ont été collectées rétrospectivement. Tous les cas ont été présentés à 10 experts internationaux dans le domaine des RE Y90, dont 9 centres à haut volume.
Six patients jugés éligibles à l'étude sur 187 patients sélectionnés
Entre février 2009 et juillet 2015, 187 patients atteints de tumeurs malignes primitives et secondaires du foie ont subi une RE Y90 avec des microsphères de résine. Quarante-trois patients avaient des antécédents de chirurgie du foie allant de la thérapie ablative à une hémihépatectomie prolong. Six patients ont été jugés éligibles par le panel d'experts. Le bilan d'imagerie avant la procédure de RE nécessitait au moins une TDM ou une IRM multiphasique, avec ou sans PET Scan au18F-FDG. Un macro-agrégat au technétium-99m (99mTc-MAA) a été utilisé pour simuler l'imagerie post-embolisation par coils des vaisseaux hépatiques pertinents au cours de l'angiographie préparatoire. Les calculs de dose ont été effectués en conformité avec les lignes directrices consensuelles internationales et la dose prescrite a été calculée en GBq par l'équation suivante = BSA (m2) - 0,2 +% d'atteinte tumorale/100.
Utiliser prudemment la méthode BSA en cas de faible volume de foie restant
Cette étude a démontré que, dans la pratique clinique actuelle, il n'y a pas de consensus concernant la méthode préférée d'ajustement de la dose prescrite chez les patients ayant des antécédents de chirurgie du foie. Dans un pourcentage élevé de cas, le groupe d'experts a convenu qu'un faible volume de foie restant après chirurgie est un argument en faveur d'une utilisation prudente de la méthode BSA, en raison du risque élevé de surdosage et une dose cible spécifique a souvent été prescrite (± 50 Gy. Les patients éligibles au traitement par ER Y90 représentent un groupe hétérogène avec des caractéristiques de maladie distinctes. De plus, la vascularisation tumorale peut différer, ce qui influence la biodistribution de l'activité délivrée par les microsphères aux tissus tumoraux et non tumoraux. Enfin, l'étendue de la chirurgie du foie diffère fortement, ce qui entraîne d'importantes différences entre les volumes hépatiques restants.
Appliquer un algorithme basé sur le volume traité pour évaluer la dose émise par radioembolisation
Au final, les patients sélectionnés étaient représentatifs pour la pratique quotidienne, avec un risque de sous-dosage et de surdosage chez les patients ayant une dose prescrite similaire (basée sur la méthode BSA) mais un volume de foie restant et une dose cible distincts. Mais l'absence de lignes directrices pour la dosimétrie, en particulier dans ce groupe de patients, affecte directement les résultats cliniques et devrait être étudiée plus en profondeur. Pour le calcul de l'activité de la RE Y90 par microsphères de résine, un algorithme de calcul de dose basé sur le volume est recommandé et une dose cible de 50 Gy semble une recommandation provisoire sûre, avec une réduction supplémentaire dans le cas de tumeurs relativement hypovasculaires, d'une fonction hépatique fragile ou d'un patient lourdement prétraité.
Bruno Benque avec European Radiology