Bloc opératoire : un guide ASN de formation IBODE qui crée une ambigüité
MERCREDI 18 SEPTEMBRE 2019
Dans un guide pratique à l'attention des IBODE, l'ASN a ouvert la porte à ces derniers pour les former à l'aide à la réalisation d'actes interventionnels. Mais ce texte comprend quelques dispositions ambigües quant à la nature effective de l'aide qu'ils pourront apporter.

Les textes de Loi ou de recommandations de bonnes pratiques pouvant faire l'objet d'un consensus limité sont souvent publiés, c'est bien connu, pendant la période estivale au cours de laquelle les principaux intéressés n'attachent que peu d'attention à l'actualité professionnelle.
Les IBODE en renfort pour la réalisation d'actes interventionnels au bloc opératoire
Nous avons pu le vérifier cet été, avec la publication, par l'Autorité de Sureté Nucléaire (ASN), de quelques guides pratiques destinés aux acteurs de la radiologie. L'un de ces documents concerne les infirmiers de bloc opératoire (IBODE) et stipule que, en l’absence de manipulateur (MERM) en salle d'intervention,"l’IBODE peut apporter, sous la responsabilité du chirurgien et sous réserve d’une habilitation au poste de travail, une aide dans la réalisation d’actes interventionnels, sans pouvoir déclencher et paramétrer le dispositif médical exposant le patient aux rayonnements ionisants, ni traiter les images produites notamment pour les actes à faible enjeu dosimétrique".
Des textes qui verrouillent les prérogatives des MERM dans ce contexte
Il est vrai que les manipulateurs se font rares dans les blocs, sous l'effet conjugué de la pénurie qui s'est amorcée depuis environs deux ans et du développement des interventions radioguidées et des pratiques mini-invasives. Le guide rappelle toutefois la décision n°2019-DC-0660 de l’ASN du 15 janvier 2019, qui stipule que "des tâches peuvent être confiées aux IBODE et sont à définir en tenant compte que les MERM sont les seuls professionnels de santé habilités à paramétrer et à déclencher l’appareil y inclus le traitement de l’image". Il fait état également de l'obligation de formations à la radioprotection des patients
et à la radioprotection des travailleurs, qui font l'objet de textes réglementaires.
Un passage qui fait naître une ambiguïté
Mais la formation à l’utilisation de l’équipement émetteur de rayonnements ionisants que l'ASN fait figurer dans son nouveau guide ne fait référence qu'à une recommandations du 13 juin 2016 de la même ASN. Cette distinction pourrait ouvrir une brèche dans les dispositions relatives aux habilitations des IBODE. Il est question d'une contribution de celui-ci limitée aux seuls actes interventionnels à enjeu faible. Quelle contribution ? Seront-ils habilités à déclencher les rayonnements lors des actes à "enjeu faible" ? Et qu'est-ce qu'un "enjeu faible" ? Le texte parle "d’actes réalisés sous arceau mobile au bloc opératoire, dont la réalisation ne nécessite pas d’adaptation de protocole" ou "délivrant une dose inférieure à 10 Gy.cm2 (PDS) en fin de procédure". Les MERM seront-ils encore les seuls habilités dans ces cas là ?
Un guide élaboré avec l'aval du G4 et de l'AFPPE
Beaucoup de précautions sont prises, c'est évident, pour éviter une levée de boucliers contre ce qui apparaît désormais comme une intrusion des IBODE dans les compétences réservées aux MERM. Car, si les premiers sont autorisés à "seulement appuyer sur le bouton", ils obtiendront, dans un futur proche n'en doutons pas, une extension de leurs prérogatives sur ce champ. Le Guide ASN a été élaboré en concertation avec le Conseil national de la radiologie (G4) et l'AFPPE, les institutions représentatives majeures des professionnels du secteur. Espérons qu'ils ont bien évalué les dérives que ce type de texte peut engendrer et qu'ils resteront vigilants sur ce point...
Paco Carmine