Cloud, SaaS, PACS : les régions prennent la main !
LUNDI 02 SEPTEMBRE 2013
Depuis la mise en place opérationnelle des ARS, issues de la loi HPST, chaque région se dote d’une structure dite « Groupement de Coopération Sanitaire » (GCS) à vocation technologique. Ces GCS sont porteurs de projets et proposent une offre de services numériques et de prestations intellectuelles à valeur ajoutée dans des contextes économiques et démographiques variés. Faire la synthèse des besoins régionaux, proposer les bonnes solutions, mutualiser services et ressources dans un cadre de pilotage commun, voilà les enjeux de ces nouveaux acteurs high Tech de l’écosystème de santé.
Matthieu Capon, référent imagerie/SI pilotage, GCS e-santé Pays de la Loire
Un projet innovant pour des usages « collés » aux besoins : MICS (Medical Imaging Cloud Services)
Notre projet se décline selon trois axes : médical – fonctionnalités et réponse aux besoins du métier –, informatique – fiabilité et facilité de gestion – et financier – maîtrise des coûts. La notion « à la demande » du PACS en mode Cloud s’entend par : « le médecin accède à un large panel de services disponibles n’importe où, en temps réel, le DSI exploite la puissance d’un data center agréé, reconnu et sécurisé ; la Direction dispose quant à elle d’un modèle économique qui correspond à l’activité réelle de l’établissement. »
En synthèse, ce projet de PACS en mode Cloud propose un ensemble de services avec un paiement à l’usage, correspondant bien aux besoins de l’ensemble des acteurs de santé.
Ce projet doit délivrer 6 briques technologiques :
1) Interconnexion des PACS. La possibilité de faire communiquer un PACS avec un autre dans la région. Les praticiens auront accès à l’ensemble des images issues des PACS connectés sans avoir à faire de demandes aux établissements. Dans un second temps, nous envisageons une agrégation nationale via le DMP, permettant de faire communiquer ces briques avec d’autres régions.
2) Diffusion aux correspondants de ville. C’est la possibilité pour un praticien de mettre à disposition ses images à destination de n’importe quel clinicien ou praticien de ville. Nous envisageons d’utiliser le DMP comme support à cette diffusion.
3) L’archivage des examens. La réglementation liée à la durée de conservation des données patients induit une obligation d’archivage des examens. Le GCS doit s’assurer, voire garantir en tant que fournisseur du service, que cette brique est interopérable, qu’elle respecte les conditions d’hébergement de données de santé, ainsi que les normes en vigueur définies par l’ASIP Santé.
4) La sécurisation des PACS dans les établissements qui ne disposent pas de solution de backup tel que défini dans le cadre d’un Programme de Restauration de l’Activité – PRA – informatique et des Plans de Continuité d’Activité – PCA. Le PACS régional peut s’envisager comme une solution de backup en cas de défaillance du PACS de ces établissements dans l’attente de son rétablissement.
5) Un PACS dans le Cloud. Nous voulons quelque chose de très innovant ! En séparant l’aspect visualisation de l’aspect stockage et gestion des examens d’imagerie, nous voulons proposer un « PACS Store », où les éditeurs pourraient mettre leurs couches logicielles et facturer au service. À notre connaissance, nous sommes la seule région à proposer cette évolution totale du cloud : plus de contraintes sur l’éditeur du point de vue du médecin, qui choisit l’application adaptée sur laquelle il est formé.
6) Post-traitement avancé en imagerie. La reconstruction en 3D, les analyses complexes, par exemple, sont des traitements qui demandent beaucoup de ressources et de calcul. L’idée est de fournir, à tous les acteurs en région, l’ensemble de ces services de post-traitement. En général, ces systèmes sont coûteux. Et cela crée une non-équité d’accès au soin sur le territoire. Le projet vise à réduire cette inégalité dans le prolongement du Plan Régional de Santé.
Une vision macroscopique pour un accompagnement terrain adapté
Notre objectif est vraiment de servir d’appui méthodologique sur le scope des systèmes d’information partagés dans la région, par la mise en œuvre des directives ARS – le PRSIPT – et par l’accompagnement des établissements de la région sur tous les grands projets.
Patrick Vandenbergh,Directeur de la stratégie et des projets ARS Rhône-Alpes
Les projets de télé-imagerie et de PACS sont nés en 2008-2009 et ont été lancés du temps de l’ARH. Ils ont connu des freins technologiques et humains. Une forme de « résistance culturelle au partage » a précédé le lancement des opérations et le changement induit. En ce qui concerne le PACS, nous avons été principalement soutien « moral » et financier. Le PACS partagé réunit une dizaine de structures de la Loire, qui ont mutualisé leur stockage d’images – pas uniquement médicales – sur un ancien site industriel reconverti à l’initiative de collectivités locales du département. Il y a eu un gros projet départemental de « stockage numérique », auquel nous avons été associés.
L’axe le plus stratégique, maintenant, est ce que nous développons en propre autour de notre plate-forme de dossiers dématérialisés DPPR – Dossier Patient Partagé et Réparti –, comme par exemple un certain nombre de services de télé-imagerie pour améliorer la permanence des soins – comme dans beaucoup de régions, nous manquons de radiologues dans quelques hôpitaux – en faisant réaliser de l’analyse d’images à distance par des médecins experts. Nous maintenons ainsi une permanence radiologique de proximité dans plusieurs établissements.
La plate-forme propose un choix d’éditeurs, de progiciels et de services
Une de nos valeurs a toujours été de ne pas s’immiscer dans les choix des établissements en matière d’applicatifs et d’éditeurs. Le système rend interopérables tous les éditeurs entre eux par la réalisation de connecteurs. C’est aux éditeurs de faire le travail d’adaptation de leurs applicatifs pour qu’ils puissent communiquer avec la plate-forme. Ce système permet de développer une médecine collégiale qui repose sur le partage des données médicales entre tous les acteurs, sous certaines conditions de confidentialité et d’authentification. Tout cela s’est construit à partir des réseaux : les précurseurs ont été, en termes métier, les réseaux de cancérologie. Autour de l’architecture centrale que constitue le dossier patient se greffent plusieurs services, dont la télé-imagerie avec deux objectifs métier : la permanence des soins et l’expertise.
En ce qui concerne la télémédecine ou la télé-imagerie, Rhône-Alpes a la particularité d’être la seule région en France à développer un dossier stocké, hébergé et qui regroupe l’ensemble des pièces relatives au parcours du patient. Nous sommes sur un système réparti : chaque fois qu’un document médical est créé, il reste stocké là où il a été produit – soit sur le PC du professionnel libéral, soit dans le SI de l’hôpital –, mais il est rendu disponible à l’ensemble des professionnels ou des établissements raccordés à la plate-forme ; nous avons un identifiant régional des patients avec 3 millions de patients identifiés, dont 50 % ont un dossier alimenté et indexé. L’objectif premier : permettre d’échanger des données médicales de manière sécurisée, via le couple carte CPS et carte Vitale du patient, le professionnel ayant été auparavant habilité par le patient à accéder à son dossier.
Le projet Zéro Papier en Rhône-Alpes – ZEPRA – permet aujourd’hui de développer les usages dans le champ de la médecine libérale. Même si le PC d’un médecin n’est pas raccordé à la plate-forme, l’hôpital peut lui envoyer un compte rendu en l’informant par mail qu’un document relatif à son patient lui est accessible. De même, la communication avec les autres plates-formes qui ne seraient pas dans notre région a été anticipée dès le début, notre identifiant régional ayant vocation à disparaître le jour où l’identifiant national sera déployé.
Nous ne sommes pas concurrents du DMP puisqu’aujourd’hui les documents médicaux produits alimentent en même temps la plate-forme régionale et le DMP lorsqu’il est créé, grâce à une passerelle spécifique qui a été mise en place par le GCS dans tous les établissements raccordés. Les premières initiatives, dans ces domaines complexes du partage de données médicales dématérialisées, ont été prises dans la région il y a une dizaine d’années et nous commençons seulement maintenant à voir les usages se développer à une vitesse significative.
L’effort est à poursuivre, notamment dans le champ de la médecine libérale, et l’Agence en a fait un des objectifs prioritaires de son PRS – Projet Régional de Santé – au sein du programme de télémédecine.
Marie-Valentine Bellanger