La lévothyroxine confirme ses effets sur la densité osseuse
LUNDI 25 NOVEMBRE 2024
Il semblerait qu’une prise de lévothyroxine prolongée pourrait entrainer une perte de densité osseuse. Une étude présentée au RSNA 2024 s’appuie sur l’ostéodensitométrie pour évaluer la masse osseuse et sa densité afin de valider cette hypothèse et conclut qu’une évaluation bénéfice-risque est nécessaire avant la poursuite du traitement.

La lévothyroxine, le deuxième médicament le plus couramment prescrit aux personnes âgées aux États-Unis, pourrait être associée à une perte osseuse, selon une étude qui sera présentée au congrès 2024 de la Radiological Society of North America (RSNA).
La lévothyroxine est une version synthétique de la thyroxine et est couramment prescrite pour traiter l'hypothyroïdie. Environ 23 millions d'Américains, soit environ 7 % de la population, prend de la lévothyroxine quotidiennement, parfois depuis de nombreuses années sans indication majeure. Or, il semble qu’une prise de lévothyroxine alors que la TSH se situe entre 0,4 et 5,0 mU/l soit associé à un risque accru de fracture osseuse.
Une prise de lévothyroxine prolongée pourrait entrainer une perte de densité osseuse
« Les données indiquent qu'une proportion significative des prescriptions d'hormones thyroïdiennes peuvent être administrées à des personnes âgées sans hypothyroïdie, ce qui soulève des inquiétudes quant à un excès relatif ultérieur d'hormones thyroïdiennes, même lorsque le traitement est ciblé sur des objectifs de référence », précise le Dr Elena Ghotbi, chercheur postdoctoral à la faculté de médecine de l'Université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland – USA) et auteur d’une étude sur le sujet présentée au RSNA 2024.
Pour cette étude, le Dr. Ghotbi et ses collègues ont cherché à déterminer si l’utilisation de lévothyroxine et des taux d’hormones thyroïdiennes supérieurs à la plage de référence sont associés à une perte osseuse plus élevée au fil du temps chez les adultes « euthyroïdiens » plus âgés, c’est-à-dire les adultes ayant une fonction thyroïdienne normale. Les chercheurs ont utilisé la Baltimore Longitudinal Study of Aging (BLSA), une étude de cohorte observationnelle prospective portant sur des personnes âgées de 65 ans et plus qui ont eu au moins deux visites et des tests de la fonction thyroïdienne systématiquement dans les plages de référence.
Une étude s’appuie sur l’ostéodensitométrie pour évaluer la masse osseuse et sa densité
« Cette recherche est une collaboration entre Johns Hopkins et le BLSA, l'étude la plus longue sur le vieillissement, menée par le programme de recherche intra-muros de l'Institut national sur le vieillissement, ajoute la co-auteure, le Pr Eleanor Simonsick, épidémiologiste et Directeur du BLSA. Les nombreuses données du BLSA comprennent des mesures d’ostéodensitométrie répétées à chaque visite d'étude, ce qui fournit des informations précieuses sur la progression de la densité osseuse et des modifications de la masse osseuse au fil du temps, offrant ainsi une compréhension plus complète de l'ostéoporose liée au vieillissement. »
Le groupe d'étude comprenait 81 utilisateurs de lévothyroxine euthyroïdienne (32 hommes, 49 femmes) et 364 non-utilisateurs (148 hommes, 216 femmes), avec un âge médian de 73 ans et des taux de TSH de 2,35 lors de la visite initiale. D'autres facteurs de risque tels que l'âge, le sexe, la taille, le poids, la race, les médicaments, les antécédents de tabagisme et la consommation d'alcool ont été pris en compte dans l'appariement des scores de propension des utilisateurs de lévothyroxine par rapport aux non-utilisateurs.
Une évaluation bénéfice-risque nécessaire avant la poursuite du traitement
Les résultats ont montré que l'utilisation de lévothyroxine était associée à une perte plus importante de masse osseuse totale et de densité osseuse, même chez les participants dont les taux de TSH se situaient dans la plage normale, sur un suivi médian de 6,3 ans. Cela reste vrai lorsque l’on prend en compte la TSH de base et d’autres facteurs de risque.
Le Pr Jennifer Mammen, co-auteure principale et professeure agrégée d'endocrinologie à Johns Hopkins, conseille aux adultes prenant de la lévothyroxine de discuter de leur traitement avec leur médecin et de surveiller régulièrement leurs tests de la fonction thyroïdienne. « Une évaluation bénéfice-risque devrait être menée, en pesant la force des indications du traitement par rapport aux effets indésirables potentiels de la lévothyroxine dans cette population », conclut-elle.
Paco Carmine