Radio-embolisation du carcinome hépatocellulaire : la recherche avance
VENDREDI 26 NOVEMBRE 2021
L’arsenal thérapeutique contre le carcinome hépatocellulaire s’est enrichi, durant ces dernières années, d’une procédure de radiologie interventionnelle efficiente, la radio-embolisation. Celle-ci peut être couplée, désormais, à l’immunothérapie, comme des programmes de recherche tentent de le prouver. Mais dans ce domaine, les cohortes de patients à inclure ne sont semble-t-il pas suffisantes.

La radiologie interventionnelle (RI) est certainement la discipline médicale qui connaît le développement le plus rapide et le plus transversal aujourd’hui. Les interventions mini-invasives permises par cette surspécialité de l’imagerie médicale concernent désormais les pathologies digestives, urologiques, neurologiques, vasculaires, osseuses, etc., et ne cessent de s’étendre.
Les étonnantes possibilités thérapeutiques de la radiologie interventionnelle
Les gestionnaires hospitaliers suivent d’ailleurs cette tendance, preuve en est le nombre croissant d’installations de salles d’imagerie multimodales - dites hybrides – dans les blocs opératoires modernes. Et pour abonder dans ce sens, citons la réforme du troisième cycle de la formation des médecins radiologues qui a initié, depuis la rentrée 2021, une extension du DES de radiologie matérialisée par deux années supplémentaires consacrées à la Radiologie Interventionnelle Avancée (RIA).
C’est dans le domaine de l’oncologie, spécialité hautement transversale elle aussi, que la RI est la plus inventive et la plus porteuse d’espoir pour les patients. Les tumeurs inopérables, soit parce qu’elles se situent dans une région inaccessible pour le chirurgien, soit parce que l’état du patient n’est pas compatible avec une procédure chirurgicale classique, peuvent bénéficier désormais des techniques issues de la RI. Plusieurs agents physiques peuvent être mis en œuvre dans ce cas, comme la cryothérapie, la radiofréquence, les micro-ondes, la chimio-embolisation ou la radio-embolisation.
La radio-embolisation passe en première ligne pour le traitement du carcinome hépatocellulaire
Cette dernière est la technique la plus récente et celle qui semble avoir le meilleur potentiel dans les cas complexes. Lors du récent congrès F.IR.E 2021, qui s’est tenu en ce mois de novembre 2021 à Marseille, la radio-embolisation du carcinome hépatocellulaire (CHC) a fait l’objet d’une session dédiée. Si certaines conditions sont satisfaites, comme une réserve hépatique suffisante ou un ciblage précis de la zone à irradier notamment, cette procédure permet au patient d’atteindre en moyenne une survie de 27 mois désormais. De quoi attendre avec plus de sérénité une prochaine transplantation si les choses tournent mal. Ce traitement est susceptible, de plus d’être curatif pour les petites tumeurs unilobaires.
L’immunothérapie comme adjuvant à la radio-embolisation
Mais ce n’est pas tout. Il est possible désormais de coupler une procédure de radio-embolisation avec de l’immunothérapie. Des programmes de recherche sont en cours pour en valider les effets pour les patients dont le pronostic n’est pas favorable. Le Pr Boris Guiu (CHU Montpellier) a détaillé les mécanismes entrant en jeu dans l’immunothérapie pour traiter les tumeurs inflammatoires, les tumeurs exclues ou les lésions touchant le système porte ou les autres organes environnants. Il est d’ailleurs l’un des instigateurs de l’étude pluridisciplinaire NIVOLEP qui implique 19 centres en France pour évaluer de telles procédures et dont les résultats ne sont pas attendus avant 2025.
La radiothérapie comme concurrent sérieux pour la recherche dans ce domaine
Mais ces nouvelles recherches impliquant l’immunothérapie comme adjuvant de la RI pour le traitement du CHC se heurtent au problème des faibles cohortes de patients à inclure. Il faut dire que la concurrence avec radiothérapie est forte sur ce champ de recherche. Les radiothérapeutes oncologues traitent de ces sujets depuis très longtemps et ont acquis une certaine aura auprès des industriels, un savoir-faire en termes de qualité et de sécurité de leurs procédures et, surtout, promeuvent des traitements moins onéreux que ceux issus de la radio-embolisation percutanée pour cette pathologie. Les radiologues interventionnels devront, dès lors, redoubler de persuasion auprès des prescripteurs, continuer à intervenir dans les RCP pour promouvoir leurs techniques de traitements et entretenir le suivi de leurs patients avec encore plus d’assiduité pour faire émerger leurs pratiques singulières mais non moins prometteuses.
Bruno Benque