Dépistage du cancer du sein: évolutions à venir d'un processus très formalisé
LUNDI 13 NOVEMBRE 2017
Le dépistage du cancer du sein fait appel à un processus très formalisé et des critères de compétences importants pour les radiologues impliqués. Mais il doit faire l'objet d'améliorations afin de recueillir l'approbation des derniers réfractaires. Retour sur deux présentations récentes de praticiens autour de l'actualité du dépistage organisé.

Le dépistage du cancer du sein par mammographie est encore très contesté dans la communauté médicale. Elle a pourtant fait ses preuves mais nécessite des améliorations afin de recueillir l'approbation de tous.
Des informations issues du génotypage pour améliorer le dépistage
C'est dans ce contexte que les Drs Suzette Delaloge, oncologue à l'Institut Gustave Roussy, et Isabelle Thomassin-Naggara ont présenté, lors de la conférence de presse des JFR 2017, une nouvelle approche pour le dépistage du cancer du sein. Alors que le dépistage classique ne prend en compte que l'âge de la patiente ainsi qu'une auto-évaluation, une nouvelle méthode est en cours d'évaluation, qui mettra en jeu, non seulement les données issues de la mammographie, mais aussi des informations issues du génotypage de la patiente.
My PEBS, une étude à grande échelle pour évaluer la méthode de dépistage individuel
Ce dépistage, dit "stratifié" ou individuel, fera appel à des scores de prédiction mathématique du risque potentiel de cancer du sein, qui utiliseront des algorithmes décisionnels pour leur prise en charge. Une première étude de dépistage individuel, dénommée Riviera, a déjà été réalisée à l'Institut Gustave Roussy et s'est révélée très pertinente pour les patientes âgées entre 40 et 50 ans. En 2018, une nouvelle étude, My PEBS, à grande échelle, puisqu'elle sera étendue à 24 institutions dans 7 pays européens et américains, utilisera cette méthode. Elle comparera le dépistage standard et le dépistage individuel afin d'identifier les critères principaux d'incidence de cancers de stade I et II.
Des radiologues très impliqués dans les campagnes de dépistage
C'est également pour tenter de convaincre les détracteurs du dépistage organisé du cancer du sein que les participants au Congrès annuel de la Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire (SFSPM), qui s'est tenu à Lille du 8 au 10 novembre 2017, ont mis en lumière les évolutions positives qui ont pu être enregistrées depuis sa mise en place en 1989 et sa généralisation en 2004. Le Dr Laurent Verzaux, radiologue libéral au Havre et membre du bureau de la Société Française de Radiologie, est intervenu lors de ce congrès pour mettre en exergue l'implication des radiologues dans les campagnes de dépistage, afin de répondre au cahier des charges que ce processus exige de satisfaire, avec une obligation de formation et un contrôle qualité spécifique notamment.
Des critères de sélection des praticiens très pointus
"Les praticiens souhaitant y participer doivent justifier d'une activité supérieure à 500 mammographies par an, produire des comptes rendus structurés et suivre la classification Bi-Rads de l'American College of Radiology (ACR), a-t-il précisé. Ajoutons ici que les radiologues assurant la deuxième lecture s’engagent à relire au moins 2000 mammographies supplémentaires par an. Le Dr Verzaux a rappelé également que l’examen clinique systématique par les médecins radiologues, au moment du dépistage, fait partie des exigences que se sont fixées les radiologues pour la réalisation de la mammographie.
Senolog, un observatoire des pratiques très pertinent
Il est revenu sur les outils de mutualisation des données radiologiques comme Senolog, l'observatoire de la pratique radiologique nourri de données issues des systèmes d’information des radiologues et qui couvre l’ensemble des examens de sénologie, de dépistage ou hors dépistage. "En 2016, 2491 radiologues ont renseigné Senolog pour 3 176 541 actes, a-t-il poursuivi. 68 % de ces actes sont des actes de mammographie, le reste correspondant aux échographies mammaires (943 329 échographies mammaires).Les radiologues déclarant à Senolog sont donc plutôt des acteurs du dépistage organisé et réalisent en moyenne 890 mammographies chacun par an; les 50 % les plus actifs des radiologues participant à Senolog assurant 80 % de l’activité." Cette concentration porte à réfléchir, selon lui, sur les seuils d’activité opposables aux radiologues, 20% d'entre eux déclarant une activité inférieure à 350 mammographies.
Il a terminé sa présentation en décrivant cette initiative comme "une Belle Histoire pour construire un programme de santé publique dans un cadre conventionnel et une culture du contrat. Mais malheureusement aujourd’hui, le risque de désorganisation du dépistage organisé est perceptible, avec un changement de paradigme, illustré par le glissement de la culture du contrat vers la culture du décret…"
Bruno Benque