Suivi TDM de la récidive tumorale des métastases hépatiques colorectales après ablation thermique
MERCREDI 12 JUIN 2024
Le suivi de la progression, par tomodensitométrie, de la récidive tumorale après ablation thermique de métastases hépatiques du cancer colorectal est peu efficace de manière classique. Des chercheurs hollandais ont évalué une méthode de suivi utilisant la clinique et la radiomique, dans une étude publiée dans la Revue European Radiology, en élargissant la cohorte de patients participants.

Bien que le traitement de référence pour les métastases hépatiques colorectales (MHCR) soit la résection, une stratégie alternative et complémentaire est possible pour les patients non éligibles, par ablation thermique, notamment aux moyens de micro-ondes et par ablation par radiofréquence.
Comment évaluer la progression tumorale par TDM après ablation des métastases hépatiques colorectales ?
Après l'ablation thermique des métastases, des taux de progression tumorale locale sont possibles, en termes de récidive de foyers tumoraux au bord de la zone d'ablation. La détection de la progression tumorale peut être difficile car les effets post-ablation et les maladies récurrentes ont des densités comparables sur la tomodensitométrie (TDM) avec produit de contraste. Il en résulte une sensibilité de 53 % pour la détection de cette progression par TDM, ce qui nécessite plusieurs contrôles et qui entraine ainsi un retard dans le traitement de la maladie.
Pour surmonter ce retard, des chercheurs hollandais ont réalisé une étude pour prédire la progression des MHCR avec l'utilisation de la radiomique des images TDM post-ablation. Si la prédiction de récidive est positive, les patients présentant un risque élevé peuvent ainsi suivre un traitement complémentaire sans délai, et un programme de suivi intensifié peut être envisagé pour les patients à faible risque.
Un travail de recherche antérieur utilise les paramètres cliniques, radiomiques et une combinaison des deux
Dans une étude originale publiée précédemment, ils ont développé et comparé trois modèles de prédiction, comprenant les paramètres cliniques, les caractéristiques radiomiques de la zone d'ablation et du bord péri-ablationnel, ainsi qu'une combinaison de paramètres cliniques et radiomiques. Le modèle combiné clinique-radiomique a donné les performances les plus élevées avec une statistique de concordance de 0,78. Les performances ont été récupérées avec une validation croisée Leave-One-Out, c'est-à-dire que les modèles n'ont pas été validés sur des cohortes de patients indépendantes.
Pour évaluer si les résultats peuvent être appliqués à d’autres populations, une validation externe est cruciale. C’est le but de la présente étude, publiée dans la Revue European Radiology, qui est de valider les modèles de prédiction radiomique clinique de l'étude originale pour prédire la récidive, après ablation thermique, de la MHCL en utilisant à la fois des cohortes de validation internes et externes indépendantes.
Une nouvelle étude sur une cohorte plus large
Pour ce faire, ils ont inclus des patients atteints de MHCR traités par ablation thermique, issus de deux institutions, pour collecter une nouvelle cohorte de validation interne et externe indépendante. Les zones d'ablation ont été délimitées sur la TDM en phase veineuse porte 2 à 8 semaines après l'ablation. Les caractéristiques radiomiques ont été extraites de cette zone d’ablation et d'un bord péri-ablationnel de 10 mm de parenchyme hépatique autour de cette dernière.
Trois modèles de prédiction publiés précédemment (clinique, radiomique, combiné) ont été testés sans recyclage. La progression de la tumeur a été définie comme de nouveaux foyers tumoraux apparaissant à côté de la zone d’ablation jusqu'à 24 mois après l'ablation. La cohorte interne comprenait 39 patients avec 68 MHCL et la cohorte externe 52 patients avec 78 MHCR.
Un modèle de prédiction jugé insuffisant qui nécessite d’évaluer sa reproductibilité
Ce travail a objectivé 34/146 MHCR ayant développé une progression après un suivi médian de 24 mois, avec un délai médian jusqu'à la progression de 8 mois. Le modèle combiné clinique-radiomique a donné une concordance statistique c de 0,47 dans la cohorte interne et de 0,50 dans la cohorte externe, contre 0,78 dans la cohorte originale publiée précédemment. Le modèle radiomique a donné une concordance statistique de 0,46 et 0,39, et le modèle clinique une concordance statistique de 0,51 et 0,51 dans la cohorte interne et externe, respectivement.
En raison du risque de surajustement du modèle original, les chercheurs ont reconnu ne pas pouvoir tirer de conclusion sur la faisabilité de la prédiction la progression tumorale basée sur la radiomique à la TDM. Cette étude souligne la nécessité d'évaluer la reproductibilité des modèles de prédiction radiomique dans des cohortes de patients indépendantes. Il souligne qu'aucune conclusion définitive ne peut être tirée d'études sans une validation interne et externe appropriée et que les recherches futures devraient s’efforcer de minimiser l’hétérogénéité entre et au sein des cohortes de patients, à la fois en termes de différences cliniques et d’acquisition d’imagerie.
Bruno Benque avec European Radiology