Le CHU de Poitiers se dote de la première IRM 7T clinique de France
MERCREDI 20 NOVEMBRE 2019
La première modalité IRM 7T à vocation clinique de France vient d’être inaugurée au CHU de Poitiers. Un investissement important a été mobilisé pour cette installation qui a fait l’objet de la construction d’un bâtiment spécifique et d’une salle d’examen surdimensionnée en dimensions et en blindage.

Le 15 novembre 2019 fera date dans la communauté radiologique française. C’est en effet ce jour-là qu’a été inaugurée, à Poitiers, la première IRM 7T à visée clinique en France.
Naissance du laboratoire d’imagerie métabolique multi-noyaux multi-organes
Le Directeur Général du CHU de Poitiers, Jean-Pierre Dewitte, était pour l’occasion maître de cérémonie, entouré du Pr Rémy Guillevin, Responsable du Laboratoire DACTIM et co-directeur du Laboratoire I3M, de Gilles Bloch, PDG de l’INSERM, d’Hassan Safer, Président de Siemens France, et du maire Alain Claeys notamment. Au fil des déclarations, la vision innovante et l’enthousiasme du Pr Guillevin, associés à la détermination de Jean-Pierre Dewitte pour mener à bien la partie opérationnelle de ce projet ont été mis en lumière.
Ce projet a en effet été initié en 2016 par Pr Rémy Guillevin et le Pr Christine Fernandez, responsable du Laboratoire XLIM UMR CNRS 7252 de l’Université de Poitiers, en collaboration avec le CHU de Poitiers et la Société Siemens Healthineers. Il a donné naissance au laboratoire d’Imagerie Métabolique Multi-noyaux Multi-organes (I3M), inauguré en juin 2019. Ce laboratoire fera figure d’exemple pour la recherche translationnelle, puisqu’il mettra en commun les travaux de cliniciens et de scientifiques de différentes filières, dont des mathématiciens, une première pour un projet à vocation médicale. Un partenariat scientifique a également été conclu avec la Corée du Sud qui possède déjà ce type de machine depuis quelque temps.
Quelques 8 000 litres d’hélium pour une seule machine
Le CHU de Poitiers dispose donc désormais de deux modalités d’IRM à vocation de recherche, une 3T, l’autre 7T. Pour les faire fonctionner, le CHU a détaché huit manipulateurs référents, dont quatre vont être formés pendant 2 semaines sans interruption par les ingénieurs de la société Siemens pour la mise en œuvre de la modalité 7T. L’ensemble de l’équipe sera, en outre, surveillée de près par le service santé au travail du CHU de Poitiers afin de prévenir tout risque lié à l’exposition aux champs magnétiques intenses.
L’IRM 7T est une machine imposante dont le tunnel, d’un diamètre de 60 cm, approche les 3m de long et qui nécessite, pour satisfaire aux normes de sécurité, d’être installée dans un local de 80m2. Son aimant pèse vingt tonnes et elle nécessite quelques 8 000 litres d’hélium pour assurer son fonctionnement. L’installation d’un tel équipement a nécessité la prise en compte d’importantes contraintes qui ont rendu obligatoire la construction d’un bâtiment spécifique répondant au cahier des charges. Dans ce cadre, il a fallu mettre en place un blindage des murs spécifique, aux moyens de 12 tonnes de fer doux, en plus de la cage de Faraday. C’est le prérequis pour que les lignes de champs soient circonscrites à l’intérieur du local. La nouvelle structure bâtie, imaginée pour réunir l’ensemble des acteurs impliqués dans le projet, hébergera également l’équipe de chercheurs du laboratoire I3M qui pourra mener ses travaux à proximité immédiate de la plateforme d’exploration. Le projet a, au final, coûté la bagatelle de plus de 11 millions d’euros.
Des applications cliniques en neuroradiologie et en ostéo-articulaire
L’IRM 7T du CHU de Poitiers est la première en France à pouvoir réaliser des examens cliniques, en plus d’une activité de recherche. Elle a donc, pour cela, reçu le marquage CE. Les deux autres modalités de ce type déjà installées en France, à Saclay et au CERIMED de Marseille, ne fonctionnent que pour des travaux de recherche. Elle attirera donc, de ce fait, les convoitises de nombre de cliniciens ou chercheurs de la région. Le Pr Rémy Guillevin a précisé, lors de son allocution, que la partie clinique de son activité permettra de faire de l’imagerie de recours, pour apporter des éléments diagnostics que les autres modalités ne peuvent pas assurer. Il a ajouté que, dans ce contexte, la gestion de la file d’attente sera gérée par un Comité de pilotage et un Comité scientifique, afin de maîtriser le flux des demandes.
Sur le plan clinique, cette modalité assurera dans un premier temps des examens ciblés sur la neurologie et l’ostéo-articulaire. Elle permettra notamment de faire progresser le diagnostic en neuroradiologie, en particulier dans le cadre de l’épilepsie chez les jeunes, des affections touchant les noyaux gris centraux, de l’Alzheimer ou des gliomes. Le Pr Guillevin a également évoqué des travaux de recherche métabolique ainsi que la mise en œuvre de la biopsie « virtuelle ». Les explorations ostéo-articulaires seront, quant à elles, axées sur les maladies arthrosiques, notamment l’étude de l’altération des cartilages. Il fonde beaucoup d’espoir sur cette technologie pour identifier, très en amont des signes cliniques, des diagnostics de spondylarthrite ankylosante par exemple.
Le décor est planté, le matériel installé, les paramétrages en cours de finalisation, il ne reste plus qu’à exploiter la machine. Une nouvelle ère s’ouvre pour l’imagerie médicale française…
Bruno Benque