Des traitements radiopharmaceutiques facteurs de risque cardiovasculaire
LUNDI 10 MARS 2025
L’administration de radiopharmaceutiques thérapeutiques sont-ils responsables de maladies cardiovasculaires induites ? C’est ce que cherchent à comprendre des chercheurs coréens dans un article publié dans l’European Journal Nuclear Medicine & Molecular Imaging (EJNMMI). Ils évoquent un passage significatif d’une partie de la dose de 177Lu-PSMA dans le système vasculaire et une grande variabilité de dose absorbée dans le sang dans le cadre de l’irathérapie. Dans tous les cas, une surveillance régulière est recommandée.

L’imagerie moléculaire connaît, ces dernières années, un essor spectaculaire et ses applications couvrent désormais le champ thérapeutique. Les services de médecine nucléaire ont ainsi enrichi leur champ d’activités au traitement des cancers thyroïdiens ou prostatiques notamment, pour des patients nécessitant un complément après chirurgie.
L’administration de radiopharmaceutiques thérapeutiques sont-ils responsables de maladies cardiovasculaires induites ?
Mais l’ingestion ou l’injection de radiopharmaceutique n’est pas sans risques pour le patient, en particulier pour son système cardiovasculaire. C’est le sujet qu’ont choisi d’aborder des chercheurs allemands et néerlandais dans un article publié dans l’European Journal Nuclear Medicine & Molecular Imaging (EJNMMI). Le groupe de travail 119 de la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR) y consacre ses travaux, dans le but de fournir des conseils sur les données disponibles concernant le risque de maladie cardiovasculaire à tous les niveaux de dose, y compris les considérations concernant un seuil de dose.
Un passage significatif d’une partie de la dose de 177Lu-PSMA dans le système vasculaire
Car les données sur les thérapies radiopharmaceutiques dans ce contexte sont rares. Plusieurs études relatives aux conséquences des traitements utilisant le 177-LuPSMA ont observé des doses absorbées dans le sang d’au moins 0,1 Gy par cycle de traitement, entraînant des doses absorbées cumulées de plus de 0,3 Gy après plusieurs cycles de traitement. On distingue par exemple une dose médiane absorbée dans le sang de 0,1 Gy pour un seul cycle de traitement pour une activité de 6 GBq de 177Lu-PSMA I&T ou une dose absorbée estimée dans le sang d'environ 0,3 Gy pour un cycle avec 7,4 GBq de 177Lu-PSMA-617.
L’espérance de vie des patients généralement traités par 177Lu-PSMA étant limitée, les chercheurs ne peuvent pas estimer d’effet sur la maladie cardiovasculaire. En revanche, certains patients étant traités plus précocement, la thérapie 177Lu-PSMA est susceptible de faire courir un risque de développer une maladie cardiovasculaire au patient.
Concernant la thérapie à l'iode radioactif (IRA) du cancer de la thyroïde, les données disponibles semblent plus nombreuses. Les chercheurs ciblent une étude observationnelle sur la mortalité cardiovasculaire à long terme où l’activité médiane administrée d’iode 131 est de 7,4 GBq avec un suivi médian de 10,5 ans. Cette étude a été la première à signaler un risque accru de mortalité cardiovasculaire et toutes causes confondues chez ces patients, indépendamment de l’âge, du sexe et des facteurs de risque cardiovasculaire.
Une grande variabilité dans la dose absorbée dans le sang dans le cadre de l’irathérapie
Mais dans une cohorte de patients coréens, l’activité cumulative médiane administrée est de 3,7 GBq mais aucune différence significative n’est observée pour le risque cardiovasculaire entre les groupes de patients atteints d’un cancer de la thyroïde ayant reçu une irathérapie et ceux qui n’en ont pas reçu. Les auteurs de l’article ont pu montrer, dans l’un de leurs travaux, que, dans un groupe de 209 patients atteints d'un cancer différencié de la thyroïde, la dose absorbée dans le sang est un meilleur prédicteur du succès de l'irathérapie et qu'il existe une grande variabilité dans la dose absorbée dans le sang pour les patients recevant la même activité administrée.
Ils en concluent donc que, bien qu’une relation claire entre l’exposition aux rayonnements provenant d’une thérapie radiopharmaceutique et les maladies cardiovasculaires n’ait pas encore été établie avec certitude scientifique, il existe suffisamment de preuves dans la littérature pour suggérer qu’une telle relation pourrait exister. Ils préconisent donc que les doses absorbées par le système cardiovasculaire après les thérapies radiopharmaceutiques soient étroitement surveillées afin d’obtenir des données fiables sur la relation entre les doses absorbées et les maladies cardiovasculaires.
Bruno Benque