Des biomarqueurs TDM pour évaluer la réponse au traitement par le sémaglutide
MERCREDI 11 SEPTEMBRE 2024
La tomodensitométrie (TDM) assistée par l’IA fournit des biomarqueurs des changements de composition corporelle chez les patients obèses traités par le sémaglutide. Cette affirmation est le résultat d’une étude publiée dans le Journal of Roentgenology (AJR) qui a évalué les changements métaboliques provoqués par ce type de traitement.

Le Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire (BEH) publié par Santé publique France a mis en ligne une étude compilant les baromètres de de la population nous permettant de disposer d’une série temporelle sur la corpulence déclarée des adultes sur une période de plus de 20 ans, de 1996 à 2017. Ce travail objective un taux de 7% d’hommes et 6% de femmes atteints d’obésité en 1996 en France, des chiffres qui montent respectivement à 14% en 2017.
L’obésité gagne du terrain dans toutes les régions du monde
La prévalence mondiale de l'obésité est tout aussi significative, puisqu’elle a plus que doublé depuis 1990, avec environ 16% des patients adultes étant obèses (IMC ≥ 30) et 43% des patients adultes en surpoids (IMC ≥ 25) en 2022. Ces tendances sont alarmantes car l’association de l’obésité avec le dysfonctionnement métabolique et les maladies cardiovasculaires, notamment le diabète de type 2, l’hypertension, la dyslipidémie ou la maladie cardiovasculaire athéroscléreuse est connue de tous.
Le sémaglutide (Ozempic), un agoniste des récepteurs du peptide-1 de type glucagon-1 (GLP-1) à action prolongée, a été approuvé par la Food & Drug Administration (FDA) pour le traitement du diabète de type 2 et en 2021 pour le traitement de l'obésité. Il favorise la perte de poids en stimulant la libération d'insuline, en inhibant la sécrétion de glucagon et en retardant la vidange gastrique, ce qui réduit la faim et la prise alimentaire du patient.
Des changements métaboliques pouvant être endigués par le sémaglutide
Les changements dans la composition corporelle associés au traitement par cette substance restent flous, notamment le volume de graisse viscérale et sous-cutanée, la masse et la qualité des muscles abdominaux, la densité minérale osseuse (DMO) ou l’histologie des organes. Ces mesures de la composition corporelle, qui ne peuvent être dérivées d’évaluations cliniques standard, servent de biomarqueurs pour les maladies cardiométaboliques, pour la fragilité et pour le risque de mortalité.
Nous avons déjà évoqué, dans nos colonnes, les effets de l’utilisation d’outils de deep learning basés sur la TDM pour dériver des mesures de composition corporelle à partir d'images TDM abdomino-pelvienneset obtenir une évaluation plus détaillée que celle fournie par l’ostéodensitométrie, pour la DMO, ou l'analyse de bioimpédance. En tant que tels, ils peuvent être appliqués pour évaluer les changements dans la composition corporelle chez les patients commençant un traitement agoniste du GLP-1.
Des dysfonctionnements métaboliques identifiables par la TDM assistée par l’IA
Une étude publiée dans l’American Journal of Roentgenology (AJR) se propose d’évaluer les changements dans la composition corporelle de patients après le début du traitement au sémaglutide en appliquant une suite entièrement automatisée d'outils de composition corporelle basés sur l'IA à partir de la TDM.
« Les patients utilisant des sémaglutides, ou des agonistes du peptide-1 de type glucagon (GLP-1), qui ont perdu ou pris du poids, sont sujets à des changements dans les mesures de composition corporelle basées sur la TDM, souligne l’auteur correspondant, le Dr Perry Pickhardt, du département de radiologie de la faculté de médecine et de santé publique de l'Université du Wisconsin à Madison (USA). Ceux qui ont perdu du poids ont présenté des changements globalement favorables dans les mesures liées au risque cardiométabolique, tandis que ceux qui ont pris du poids ont montré une diminution de la qualité musculaire ».
Une étude confirme la pertinence de marqueurs radiologiques pour l’évaluation des changements métaboliques provoqués par l’obésité
Cette étude, l'une des premières du genre en radiologie, a inclus 241 patients (âge moyen, 60,4 ans ; 151 femmes, 90 hommes) traités au sémaglutide et ayant fait l’objet d’une TDM abdomino-pelvienne dans les 5 ans précédant le traitement et 5 ans après (janvier 2016-novembre 2023). Les chercheurs ont ensuite appliqué une suite automatisée d'outils de composition corporelle basés sur l'IA à partir de la TDM pour quantifier la zone du tissu adipeux viscéral (TAV) et du tissu adipeux sous-cutané (TASC), la zone et l'atténuation des muscles squelettiques, la zone de tissu adipeux intermusculaire (TAIM), le volume et l’atténuation du foie et la DMO. Ces résultats ont ensuite été comparés à des patients présentant une perte de poids ≥ 5 kg et un gain de poids ≥ 5 kg entre les examens.
Ce travail montre que, dans la cohorte de patients traités par sémaglutides, ceux ayant perdu du poids ont présenté une diminution de la zone TAV, de la zone ATSC, de la zone musculaire et du volume du foie, ainsi qu'une augmentation de l'atténuation hépatique. Pendant ce temps, ceux ayant pris du poids ont présenté une augmentation de la zone TAV, de la zone TASC, de la zone musculaire et de la zone TAIM, ainsi qu'une diminution de l'atténuation musculaire. La TDM, assistée de l’IA confirme donc l’existence de réels marqueurs radiologiques pour l’identification des dysfonctionnements favorisés par l’obésité et pour le suivi des traitements à base de sémaglutide.
Paco Carmine